J'ai toujours aimé les récits d'apprentissage, ou pour utiliser une sémantique cinéphilique, les coming of age movies. Nécessairement, il y a là un mécanisme d'identification qui marche à plein tube faisant fondre mon petit cœur sensible et qui pourrait me pousser à invoquer la maxime flaubertienne : "Madame Bovary, c'est moi !"... Mais au-delà de cette proximité affective évidente, il y a, dans ces histoires d'adolescents découvrant, les yeux écarquillés par la terreur et la fascination, les délices et les cruautés de l'âge adulte, une forme de pureté de cœur des personnages qui me bouleversera me semble-t-il toujours.
Ici, c'est dans le monde du travail que notre jeune premier est amené à faire son apprentissage de la vie, microcosme aux codes étranges et à la faune plus mystérieuse et impénétrable encore, et sur lesquels le metteur en scène (et par extension, son personnage principal) porte un regard amusé mais non dénué d'émerveillement. Optant pour une approche assez naturaliste et Nouvelle Vague, Olmi fait preuve d'une extrême sensibilité et d'une compréhension profonde de cet âge intermédiaire, en faisant de son héros ce que tout jeune homme de cet âge est, à savoir un observateur terrifié et curieux d'un monde dont il a encore à connaître et maîtriser les usages.
C'est cette traversée vers l'autre rive, ce mouvement d'ouverture au monde et de renoncement au repli sur soi-même, propre à l'adolescence, qu'Olmi capte avec une grande acuité du regard et un talent certain dans la mise en scène. Preuve en est cette magnifique séquence de bal où, enfin, l'enfant se résout à opérer sa mue et à s'inscrire dans le monde en rentrant littéralement dans la danse, et ainsi à être homme parmi les hommes. Mais, comme le suggère le déchirant plan final, à se résigner à n'être également que chose parmi les choses.
Un très grand petit film.
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