Les relations entre Simon et sa sœur, Louise, sont assez incroyables.
Simon, qui n'a que douze ans, ramène la plupart de l'argent à la maison. Il passe son temps à faire des allers retours entre son immeuble HLM de la plaine et la station de ski super luxe des hauteurs où il vend des skis et des équipements. Parfois, il ramène aussi des blousons et des lunettes de ski de là-haut, qu'il revend en bas.
C'est un trafic qui l'occupe à plein temps, lui, l'as de la débrouille, l'hyper-actif toujours en mouvement, cherchant les meilleurs coups, les meilleurs filons pour plaire à sa sœur. Par là-même, il veut aussi se prouver qu'il est grand, qu'il est fort et qu'il est plus intelligent que tout le monde.
Question intelligence, il n'en est pas dépourvu. Il sait, tour à tour, se montre roublard, manipulateur, charmeur, suivant les situations.
Il parle anglais, se glisse partout, est sur tous les fronts, pour dénicher les meilleurs skis, les meilleurs lunettes ou gants, pour les revendre soit en bas, soit en haut, à prix cassés.
Il domine les autres enfants par sa débrouillardise. Il ensorcelle même les adultes, qui ne sont pas dupes de son jeu, mais consentent à l'aider, séduits par son discours et son charme.
Nous aussi, spectateurs, on ne peut qu'être séduits par ce garcon si débrouillard, si attachant et en même temps si seul.
La caméra qui le suit en en plans serrés fait penser parfois à celle des Dardenne, courant après les personnages, comme celui de Rosetta ou de L'enfant au vélo. Les destins de ces deux enfants ont d'ailleurs des similitudes, comme les titres des deux films.
Simon a un bagou tellement désarmant qu'il réussit à se rapprocher d'une famille de touristes, en particulier de la maman qu'il a l'air de trouver à son goût. Cela donne une scène étonnante, une des plus émouvantes du film, dans laquelle Simon au restaurant d’altitude, partage un peu de ce temps familial, chaleureux, qu'il aurait tant aimé connaitre, on suppose, lui privé d'une famille entourante.
Ce trafic commence à intéresser sa sœur qui y voit directement les bénéfices : un blouson neuf, de qui manger, fumer et boire. Elle voudrait y participer mais Simon veille jalousement sur son savoir-faire et sa domination sur celle qu'il aime, par le bais de l'argent qu'il ramène tous les jours de ses trafics.
Simon joue à l'homme fort mais il est resté quelque part un enfant et il encore un grand besoin d'affection, de câlins, de présence. Il s’impatiente quand Louise part avec son amoureux. Il la voudrait tout pour lui, mais ce n'est pas possible, Louise tient plus que tout à sa liberté.
Il utilise l'argent comme moyen de chantage auprès d'elle pour obtenir un câlin, des caresses que Louise finit par lui octroyer, se laissant aller à un rapprochement qu'on imagine plutôt rare.
Simon finira par craquer, se révolter, car cette situation l'insupporte, mais a t'il le choix ?
Le schisme entre les paysages du haut et ceux du bas rappelle à quel point les vies ici et là sont diamétralement différentes, opposées. La cassure sociale n'y est que plus franche, terrible. Simon navigue d'un monde à un autre, tel un oiseau voyageur volant au dessus de la plaine, jusqu’aux cimes.
Mais, il en profite peu, car il est toujours en mouvement, finalement bien nulle part ?
Il faut insister sur le prestation des deux acteurs : Kacey Mottet Klein, la grande révélation de ce film et de Léa Seydoux qui interprète une Louise immature, avec brio.
Ce film lancera d'ailleurs la carrière de Kacey Mottet Kelin qui a joué depuis dans d'autres excellents films comme Keeper et récemment dans Quand on a dix-sept ans, de Téchiné.