Le scénario de Lamar Trotti - adapté d'un roman de Walter Van Tilburg Clark - exploite un motif classique de l'Ouest américain : la formation hâtive d'un posse suite à un crime (ici le meurtre d'un éleveur) et la poursuite qui s'ensuit avec le lynchage du ou des coupables en ligne de mire. Il en tire un condensé admirable de concision du débat "Law vs. Frontier Law" (cf. le monologue du personnage de Tim Roth dans le Hateful Eight de Quentin Tarantino) et présente une réflexion pertinente sur la nature de la justice.
Simple dans sa structure, le film est construit de façon très efficace : après une rapide introduction présentant les - nombreux - protagonistes et les enjeux, la machine et la démonstration sont lancées et les étapes de l'hystérie collective s'enchaînent implacablement mais jamais mécaniquement.
Car si certains personnages présentent un caractère unidimensionnel prononcé (le major Tetley par exemple), l'interprétation d'Henry Fonda est beaucoup plus nuancée : davantage en retrait que dans Douze Hommes en colère (qui présente des similitudes dans l'intention et l'exécution avec L'Étrange Incident), il est souvent en position d'observateur, prenant quelques fois des positions fortes mais hésitant en d'autres occasions à intervenir, laissant le soin au personnage d'Harry Davenport d'apporter la contradiction aux partisans d'une justice expéditive. Et que dire de la partition déchirante de Dana Andrews qui apporte au film une humanité vibrante !
William Wellman livre au final un vrai-faux western politique dont le message est toujours d'actualité.