Avec ce film, Richard Fleischer conclut sa trilogie sur les meurtriers, débutée avec Le génie du mal, puis L'étrangleur de Boston. Mais là, avec la subtilité du personnage, nommé John Christie, il accouche d'un chef-d’œuvre absolu.


Il faut savoir que le film est tiré d'une histoire vraie, et réalisé dans les lieux mêmes du drame ; depuis 1944, John Christie attirait chez lui, dans le quartier nommé Rilligton Place, des femmes et prostituées dans le but de les endormir, de les tuer, de les violer post-mortem, puis de les enterrer dans son jardin. Étrangement, son épouse a l'air de fermer les yeux sur ces horreurs.
La tranquillité de Christie va être troublée quand un jeune couple, les Evans, accompagnés de leur petite fille, veulent prendre l'appartement au-dessus. Vivant de modestes revenus, dans un deux-pièces exigu, ils vont vivre avec angoisse la nouvelle grossesse jusqu'à ce que Christie, prétendant être un ancien médecin, va se proposer d'avorter la jeune femme avec ses propres méthodes...


Ce qui est très impressionnant avec ce film, c'est qu'il nous plonge dans la tête de John Christie ; même quand il n'apparait pas à l'image, il a l'air toujours présent, comme ces scènes où il apparait derrière un rideau, épiant les curieux venant près de chez lui. Comme souvent chez les tueurs, il est très intelligent, méthodique sur sa manière de tuer, ne faisant jamais les choses à la légère, au point de percevoir chez les autres leurs faiblesses, qu'il va retourner à son avantage, pour conclure sur une horrible judiciaire qui conduira de ce fait à l'abolition de la peine de mort en Angleterre.
John Christie est incarné par Richard Attenborough, qui est tout simplement extraordinaire ; s'il s'est engagé dans le film pour porter un message contre la peine de mort, son investissement est total. Ne serait-ce que son allure qui ne paie pas de mine, en particulier la douceur de sa voix, qui n'élève pour ainsi dire jamais le ton, son allure trapue, et le crâne dégarni qu'il s'est fait lui donne un air de ne pas y toucher. Et pourtant, ce que semble montrer le réalisateur, il ne faut se fier aux apparences.


Il arrive à monter son épouse, qu'il semble tenir en son sein, qui a l'air réservée, puis Mme Evans, qui la persuade d'avorter de façon clandestine (ce qui était illégal à l'époque), et enfin le mari, de la façon dont vous découvrirez dans le film, et qui résulte à ce niveau du génie.
Le jeune couple est incarné par Judy Geeson (qui a beaucoup tourné dans les films de genre, comme chez Rob Zombie !), laquelle incarne la mère-fille indécise, qui semble avoir eu un enfant par accident, et John Hurt, dont c'est le rôle qui le fera connaitre, qui est vraiment formidable, cachant en lui une véritable panique de John Christie saura exploiter.


Comme je le disais plus tôt; Richard Fleischer a tourné en partie dans les véritables lieux du drame, un appartement exigu, ce qui explique qu'on n'ait pas droit, comme à son habitude, au fameux Cinémascope, pour un format 1:66 qui sied parfaitement à la verticalité des lieux, avec des plans-séquences qui nous permettent de plonger dans la psyché de John Christie.
Il y a très peu de musique, l'image y est souvent à la limite de la désaturation pour montrer la tristesse des lieux.


Fleischer fait partie de ces réalisateurs de génie, qui furent peu célébrés de leur vivant, entres autres parce qu'il ne fut pas considéré comme un auteur, ce qui est vrai dans le sens premier du terme ; il n'a jamais écrit un seul de ses films. Mais il suffit de voir dans trilogie de serial-killers (celui-ci, Le génie du mal et L'étrangleur de Boston), pour remarquer la forte position du réalisateur contre la peine de mort.
Pour en finir avec ce film, je le considère comme un choc. Un de ceux qui font réfléchir sur la force du cinéma, de l'image, pour une histoire incroyable et un chef-d’œuvre absolu.

Boubakar
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le 16 janv. 2017

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Boubakar

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