Un mauvais film impossible à détester pour une excellente raison : son casting, qui est la jouissance cinéphile la plus singulière observée depuis un long moment pour une comédie romantique. Imaginez le tableau, l'indépendante et solaire Dorothée Sebbagh derrière la caméra, starring Kim Rossi Stuart qui donne la réplique en français à Pascal Demolon, Catherine Jacob et la très, très cool Sophie Cattani déjà dirigée par Sebbagh dans l'excellent "Chercher le garçon"... Pour rester de marbre face à une telle affiche, il faut soit n'avoir aucun cœur, soit n'avoir rien suivi au cinéma indépendant méridional et transalpin de ces dix dernières années, lequel a marqué l'éclosion de Dorothée Sebbagh et Kim Rossi Stuart qui, en un seul film ("Chercher le garçon" pour l'une, "Libero" pour l'autre) ont réussi à s'affirmer comme deux des cinéastes les plus sensibles, les plus authentiques et les plus prometteurs de leur génération. Autant ne pas prendre de pincettes, comme on dit.
Pourtant, ce n'est pas que le titre qui est pourri dans l'Ex de ma vie. Le film est ce qu'on peut appeler un navet, une sorte de bondieuserie lo-fi à l'adresse des romantiques en guimauve qui adorent Turin parce que hihi, les Italiens sont vraiment trop beaux. Le scénario n'est guère consistant, la mise en scène encore moins, et on regrette que Dorothée Sebbagh ait à ce point remisé son style nature et frais observé dans "Chercher le garçon" pour s'essayer à une sorte d'artillerie burlesque un peu trop lourde pour être sincère. Géraldine Nakache, en caricature d'elle-même, arrache quelques sourires en se débattant avec des scènes trop écrites pour le gag. Kim Rossi Stuart s'en tire un peu mieux avec son jeu d'écorché vif qu'on croirait partiellement importé de son rôle tragique de Libero, mais ses nombreuses envolées à la Benigni créent un malaise qui ne s'estompera jamais vraiment. Pourtant, voir ces deux acteurs ensemble a quelque chose de très touchant, surtout Kim Rossi Stuart, qui se débat en amant délaissé, use à tort et à travers de son phrasé italien et parle en français avec plein de fautes rigolotes. Rien à faire, ce type, en plus d'être un cinéaste particulièrement doué, est l'incarnation la plus innocente et la plus naturelle qui soit du charme italien. Je suis hétéro, mais je l'adore. C'est tout.
Et puis il y a Sophie Cattani. On ne la voit pas beaucoup, mais comme d'habitude, quand elle est là, elle crève l'écran, avec un charisme, une fraîcheur, un don inné pour diffuser une bonne humeur, une légèreté dont on ne peut qu'être dingue. Irrésistible de simplicité dans "Chercher le garçon", elle joue ici le rôle d'une avocate un peu nympho qui est le personnage le plus réussi de tout le film, et même le seul véritablement réussi. Ses répliques sont fendardes, son débit rapide et sa gestuelle outrancière mais calculée offrent à eux seuls un véritable vivier de situations à la fois comiques et craquantes, et de façon plus générale, sa lumière, sa drôlerie naturelle, son comique de dilettante donnent envie qu'elle soit de toutes les scènes. Sa drague acharnée de l'Italien est le seul bon running gag dans cette soupe romantique graisseuse et écœurante qu'on ne peut apprécier que pour la sympathie qu'inspire son casting (et également pour sa bande-son indie pop sympa). Donc, on le redit, ce n'est pas un bon film, mais bon sang, on est quand même contents d'avoir vu tous ces chouettes types ensemble. En espérant que les uns comme les autres finissent par revenir avec de meilleurs projets, on aurait tort de bouder ce petit plaisir coupable si on est fan de cette improbable clique.