Je voulais revoir ce film vu il y a longtemps, c'est chose faite, et vraiment quel régal ! il s'agit d'un des fleurons du cinéma d'humour britannique, un film de la grande période des Studios Ealing de Londres, tout comme Noblesse oblige ou Tueurs de dames, où comme par hasard oeuvrait le génial Alec Guinness qui ici, fait encore tout le sel de cette comédie, bien entouré par Joan Greenwood, Cecil Parker et Michael Gough, qu'on retrouvera ensuite dans les films gothiques de la Hammer.
Son héros incarné par Guinness est un modeste employé de laboratoire dont la découverte risque de révolutionner l'industrie textile à cause d'un tissu inusable et insalissable ; mais ce tissu indéchirable met en péril toute l'industrie et pourrait ruiner aussi bien les patrons que les ouvriers qui se retrouveraient tous au chômage.
Comme on le voit, sous des dehors de satire féroce sur les contingences économiques et le progrès, L'homme au complet blanc est en fait un conte philosophique qui remet en cause les bienfaits de l'industrialisation, rejoignant ainsi les Temps modernes de Chaplin. Bien que dépeint sous une apparence sympathique, le personnage naïf et lunaire incarné par Guinness n'est pas non plus exempt de reproche, car il est inconscient des conséquences de son invention. On a donc droit à une réflexion sur la société de consommation et le lobbying qui s'avère prémonitoire puisque c'est ce que l'on vit de nos jours, mais ce regard sur une réalité sociale amère est tempéré par un grain de folie, un burlesque absurde, avec un ton plein de charme et de légèreté à l'humour british dont seuls les Anglais sont capables. Et le final lucide et moralisant rassure tout le monde.
Sans être du niveau de Noblesse oblige, c'est un film assez méconnu, mais très drôle malgré son sujet, le second réalisé par Alexander Mackendrick qui retrouvera Alec Guinness dans la comédie d'humour noir Tueurs de dames 4 ans plus tard. A savourer.