Tourné en 1957, L'homme de l'Arizona (The tall T) est le deuxième film sur sept du duo Scott, Boetticher et, autant couper court à tout suspense, quoique moins marquant que Sept hommes à abattre, il est un excellent western qui offre tour à tour une belle évocation de la vie au far-west, des personnages à la psychologie étudiée, une intrigue prenante, très sombre et violente, de belles scènes d'action ainsi qu'une réflexion sur les malheurs induits par l'argent et la cupidité, le tout dans de superbes décors naturels et en moins d'1h20.
Une prouesse !
A bon western, bon héros : ici, c'est évidemment Randolph Scott qui s'y colle mais il n'est pas ce preux cowboy que rien n'arrête. Au contraire, c'est un bon bougre, ouvrier efficace, un quidam capable de reconnaitre sa peur, qui ne tient pas mieux que quiconque sur un taureau, dont le courage ne se mesure pas à l'aune de l'usage des armes ni à la bravoure mais à celui de se lancer à son compte dans l'élevage et de se confronter à la réalité d'une vie simple de labeur. Sa bonhomie échelonne la psychologie des autres protagonistes et leurs vicissitudes.
A bon western, jolie femme...ou pas ! Comme pour le personnage de Scott, Maureen O'Sullivan ("Toi Jane ! Moi, Tarzan !") est une anti-héroÏne, fade, pas féminine, résignée à n'avoir pour seul attrait qu'une dot colossale promise à son mari intéressé (John Hubbard) ou une énorme rançon. Malgré la grande noirceur implicite du film (meurtre d'enfant, tête explosée), aucun des trois bandits ne tente de la violenter. Elle prendra conscience de son attractivité dans une scène que l'on peut qualifier de très virile et pleine d'ambiguïté quant à la psychologie de Scott.
A bon western, bon méchant : Après le très animal Lee Marvin, c'est au tour du remarquable Richard Boone d'endosser le costume du bad guy ambivalent. Sans scrupule mais vouant un grand respect pour l'homme du travail, Scott, rêvant de construire et pareillement auto-destructeur, sa complexité s'oppose à l'uniformité caractérielle de son acolyte sociopathe joué par Henry Silva et sa trogne d'éternel salaud.
Dans la dernière et plus grande partie du film, ces personnages, dans un lieu unique devant une grotte, confrontent leurs aspirations, leurs déceptions, leur rapport à l'argent et le moyen de l'obtenir sans que la psychologie ne prévale sur l'action ou l'intrigue dont le suspense reste tendu jusqu'à la fin. La magnifique photographie et la sobriété de la mise en scène concourent à l'impression de pureté qui émane du film.
Un excellent western, donc, à voir.