La Nord-Macédonienne Teona Strugar Mitevska a imprimé la rétine des cinéphiles du monde entier dès Je suis de Titov Veles (2007), son deuxième long-métrage, et la réalisatrice a largement confirmé depuis son grand talent avec notamment Dieu existe, son nom est Petrunya. L'homme le plus heureux du monde, titre ironique, cela va de soi, commence comme un innocent Speed Dating entre célibataires de tous âges et de toutes conditions sociales. Mais le jeu va rapidement devoir se confronter aux fantômes de la guerre en Bosnie, en particulier pour deux participants quadragénaires que le hasard (ou pas) a réuni pour l'occasion. Malgré quelques pointes d'humour bienvenues et une scène de danse époustouflante, le film devient un huis-clos de plus en plus oppressant, proche de la torture psychologique pour ses personnages principaux, réminiscences dramatiques à la clé. Ce n'est pas la première fois qu'une œuvre issue de l'ex-Yougoslavie aborde le sujet de la guerre, loin de là, mais l'air est cette fois particulièrement raréfiée dans un duel éprouvant qui exacerbe des passions et une violence que l'on croyait réservées au passé. Au passage, le film montre avec acuité que l'appartenance religieuse et communautaire reste une constante de jugement en Bosnie, même en temps de paix. Le scénario de L'homme le plus heureux du monde fait montre d'une grande intelligence, avec des ruptures de ton radicales, mais son atmosphère pesante n'est pas toujours aisément supportable.