Le film attendu par de nombreux fans du réalisateur Terry Gilliam qui sort enfin en salle après 25 ans de galère et même proche de ne jamais voir le jour à cause d'un procès qui a failli empêcher sa sortie en salle au festival de Cannes.
Cependant, le film est bien là et après vingt-cinq années d'attente qu'en est-il ?
On suit dans ce film Tobby, jeune réalisateur désabusé qui a tronqué l'art pour l'argent facile de la publicité mais qui ne se satisfait pas de sa situation actuelle. Il se retrouve par hasard sur un tournage à proximité du village au sein duquel il réalisait dix ans auparavant son film de fin d'étude "l'homme qui tua Don Quichotte". Ce retour dans le passé va être l'élément perturbateur lançant les péripéties que conte le film.
Mais, le film au final n'est pas aussi extraordinaire que sa légende ne le laissait penser. En effet, la narration nous conduit de tableau en tableau comme le ferait un George Méliès et beaucoup de connaisseurs de la filmographie du monsieur parlent d'un copier-coller du film "Le Baron Munchausen".
Vierge de ce visionnage, je m'attarderai exclusivement sur le film et ce qu'il semble dire. Tout rejoins, selon moi, le rapport entre le réalisateur et l'industrie du cinéma avec l'onirisme entourant la carrière de réalisateur. Jeune, Toby parle à Angelica de devenir quelqu'un en réalisant des films mais dix ans après, le monde terne a absorbé l'esprit libre du jeune rêveur pour finalement le faire entrer dans le cadre de la société.
La quête de Toby finalement n'est que celle de beaucoup de réalisateurs aujourd'hui, dévorés par l'avarice des studios et les intérêts financiers. Très ironique au final de voir ce film clôturer le festival de Cannes, symbole des paillettes et du star system aujourd'hui et non plus acteur marquant de la découverte de cinéma indépendant.
Don Quichotte parle tout le long du film de l'Enchanteur et des forces maléfiques et il est compliqué en conclusion de ne pas retrouver ici une critique froide du système actuel. En effet, cet Enchanteur peut très bien être un transfert des Grands Studio Hollywoodiens qui embrument les esprits candides et créatifs en leur promettant monts et merveilles pour finalement ne leur laisser que les miettes dans un gouffre d'insatisfaction. Toby et Angelica ont été victimes de ces enchanteurs et au sein du film il s'agit du Russe caricatural au possible et du patron de la boîte de pub. Une grande hypocrisie entoure évidemment la totalité des personnes présentes dans l'entourage de Toby.
Terry Gilliam fait-il ici démonstration de sa frustration? Apparemment parsemée de clins d’œil à sa filmographie, le réalisateur tire peut-être un constat amère de sa carrière se mettant dans la peau de son personnage, Toby, rêveur puis conditionné avant de retrouver ce grain de folie. Le film suit également ce parcours avec un Toby conditionné, des flash-backs le montrant rêveur avant de le ramener dans sa situation actuelle pour finalement terminer sur la poursuite de ses "aventures" en rêveurs.
Dans la mise en scène, Terry Gilliam suit également des procédés très classiques dans les cadres, les cut et autres procédés de narration tandis que la fin du film reprend une esthétique qui lui est propre avec des courtes focales, un jeu sur la perception et des cadres renversant.
En conclusion, le film n'est pas un chef d'oeuvre, encore moins celui tant espéré. Le déroulement de la narration est extrêmement simple et classique mais la dernière partie, Gilliamesque, nous fait regretter de ne pas en avoir vu plus. Comme Toby et sûrement Gilliam, on est frustré. Mais le message est là, si il n'est pas surinterpréter et même si le film ne marquera pas l'histoire on ne peut que saluer la force du réalisateur qui a mener à bien son projet. La galère que vit Toby est également une transposition de la galère rencontrée par Gilliam pour faire ce film.
Au final, c'est un film à voir, pour saluer le travail du réalisateur qui a trimé 25 ans pour accoucher de cette oeuvre mais aussi pour le message qu'il tente de faire passer aux jeunes générations de cinéastes: si le médium vous conditionne, cessez d'en être esclave et faites vos films parce qu'au final, on fait des films pour soi avant toute chose.