L'homme qui était lassé d'être rien.
L'homme qui voulut être roi, "L'homme qui voulut être roi", voilà un titre de film qui donne aussitôt envie de le voir ! Un titre qui réveille rêves d'enfants, fantasmes mythologiques et théâtraux, c'est vrai, roi, ça laisse songeur comme position, dans la vie. Tu fais quoi ? Je suis roi. Woaw.
Ça commence par Kipling, qui écrit à la bougie, quelque part en Inde, pardon aux Indes, aux Indes de sa Majesté la reine d'Angleterre. Apparaît à l'auteur de L'homme qui voulut être roi, l'homme qui allait l'inspirer, Peachy Carnehan, britannique plus mendiant défiguré que gentleman. C'est à travers lui qu'on va suivre cette aventure, la sienne, et celle de Daniel Dravot, l'homme qui voulait vraiment être roi.
Milton avait du lui dire qu'il valait mieux régner en Enfers que servir ailleurs : nous voilà parti pour le Kafiristan ; vous savez ce petit pays à l'ouest de l'Inde, conquis il y a très très très longtemps par Alexandre le Grand, des souvenirs ? Tant pis. Et nous voilà pour une bonne heure d'aventures ; parce que notre futur roi il a plutôt un passé de trafiquant d'armes, de meurtriers et d'escrocs, et un impérissable souvenir de l'armée britannique, indeed ; comprenez-bien, traverser l'Afghanistan et ses montagnes enneigés avec une cargaison d'armes à dos de mules, ça ne l'inquiète pas vraiment pas ; pas plus que les bandits, la fatigue ou les torrents glacés.
Ah oui, une cargaison d'arme, Le plan est simple et clair, un parfait scénario de film pour enfants, on arrive là bas, on arme un chef local, on prend le pays avec ses hommes, nos armes, et notre savoir faire anglais indeed.
Et c'est parti ! Bataille avec charge de cavalerie et baïonnette, pillage et sports locaux, chefs tribaux et beautés locales, à peine avons-nous terminé la partie voyage et aventure, tout y est les amis ! Les grandes réjouissances ; du sang et des miracles, voilà ce qu'il faut aux bons peuples du Kafiristan ! Et il a de la chance, le Kafiristan, parce qu'on lui a dépêché Sean Connery et Michael Caine, au sommet de leurs formes - peut-être pas de leur art, mais n'en demandons pas trop -, qui d'autres, me direz-vous, pour représenter la Reine à l'étranger ?
Parfois, je vous l'accorde, on se demande un peu si ce n'est pas vraiment un film pour enfants, parce qu'entre les blagues faciles et l'épique en toc, on peut vraiment douter. Mais j'avais deux indices, cette très étrange ambiance d'amoralité - qu'on sait néfaste au bon développement d'une enfance heureuse et stable - et de colonialisme nauséabond - mais c'est sans doute la Kipling's touch -, puis cette fin que je ne vous raconterai pas...
Cette critique s'allonge un peu trop, concluons ; si j'ajoute qu'il y a aussi des seconds rôles merveilleux, comme le traducteur Gurkha ou ce bon mais cruel débile d'Ootah - très film pour enfant lui aussi ! -, des paysages chouettes comme tout - mais pas toujours très afghans -, de l'histoire avec un grand H qu'on moleste allègrement et même des Francs Maçons, il n'y a plus de raisons de ne pas courir le voir !
Inutile d'ajouter qu'à vouloir régner on peut laisser son âme ; on a vu notre roi y laisser bien plus.