Imaginaire, imaginaire... Est-ce que j’ai une gueule à me laisser faire ?

Impossible de regarder cet Imaginarium du Docteur Parnassus sans penser à l'homme derrière la caméra. Malgré la pléthore d'effets visuels en 3D, c'est toujours bel et bien le grand praticien Terry Gilliam à la barre, l'homme auteur de bien des folies dont l'utilisation d'effets spéciaux et de numérique pouvaient autant signifier une trahison de son style que la liberté ultime pour l'ex- Monty Python de nous offrir ses univers bien barrés et toujours très riches. Finalement en constatant le résultat, on se rend vite compte qu'il s'est rendu coupable des deux vices, pour le meilleur mais surtout pour le pire. Car oui, ce serait déjà la moindre des choses de reconnaître en ce film une patte, un univers, une ambiance très singuliers en leur genre. L'accent est placé sur le gigantisme, ce qui n'est certes pas une nouveauté pour l'auteur britannique, le simple fait de se tourner vers ses Aventures du Baron de Münchausen devrait s'imposer en rappel, mais qui ne s'est jamais exprimé avec autant de décomplexion dans son œuvre. Occasionnellement on a le droit à plusieurs tableaux délirants et psychédéliques qui font leur petit effet. Mais là où le bât blesse sévèrement, c'est qu'en dépit de sa plume déchaînée Terry Gilliam s'est vu contraint d'avoir recours à des effets quand même sacrément dégueulasses, et le mot est faible. Si comme moi vous trouviez le charme de son univers dans ses décors authentiques et pratiques, je vous conseille de sortir les mouchoirs en prévision de ces visions vraiment hideuses qu'incarne l'éponyme imaginaire du docteur. Textures lisses, effets 3D moches, incrustations foireuses, tout y est pour mettre perpétuellement à mal notre suspension d'incrédulité. Et ce n'est pas comme si on nous invitait à gentiment accepter la chose en nous laissant nous y habituer, le film passe constamment du tout au tout si bien que je ne suis jamais vraiment rentré dedans. À cela on me ressortirait les effets bien kitschissimes de Brazil et du Baron de Münchausen, à raison mais au moins il y avait de la personnalité et du souffle, une vraie mécanique vivante ! En plus d'apporter des problèmes d'immersion, ça apporte aussi tout son lot de problèmes de rythme, car là est le vrai reproche que j'adresserai au film : que c'est mou ! Ce n'est pas faute d'avoir tenu à mélanger réalité froide et illusions fantasques, surtout que le propos final a l'air de se tenir à cette confrontation, mais à trop s'attarder sur l'inconsistance du second on en vient à négliger la pertinence du premier ! C'est à peine si les personnages ont le temps d'exister un tant soit peu, à l'exception peut-être du docteur et de Toby au travers d'échanges et d'interprétations réussies. C'en serait presque désolant venant de celui qui a su auparavant si bien allier aventure grandiloquente et réalité en quête de contes. Désolé monsieur Gilliam mais j'ai beau avoir laissé passer bien des choses vous concernant, pour le coup votre esprit bien frappé n'a été source que d'incompréhension et d'ennui.

temet-nosce
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le 18 sept. 2024

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