Au risque de grandement déplaire, je me lance : ce film est sans doute ma plus grande déception de l'année. Certes, l'année ne fait que commencer mais quand même. Classé huitième des meilleurs films des années 90, unanimement encensé sur SC, voir L'Impasse était devenu une priorité, un manque presque honteux à combler. Et... quel désarroi ! Alors je m'explique.
Au début, je ne savais pas quoi penser du film puis l'honnêteté (avec moi-même j'entends) s'est assez vite imposée. Après un générique parfait, le film laisse place à une sympathique histoire où il est plaisant de voir Al Pacino avec un accent portoricain et une barbe et des rides qui lui vont bien. Puis Sean Penn est, il faut l'avouer, remarquable, métamorphosé. Quelques scènes sont bien faites aussi, celle où Carlito contemple sa belle sous la pluie du haut d'un toit, celle encore où un invraisemblable jeu de miroirs le pousse à défoncer la porte pour la rejoindre. Mais, et le mais ne tarde pas à arriver, vraiment rien n'élève le film au sommet où je pensais le trouver. Ann Miller, archétype des mannequins des années 90, campe un personnave un poil effrayant certes amoureuse mais à tendance hystérique et chieuse, où clairement la bonne psychologie féminine s'est tout simplement perdue en route. Ponctuant presque toutes ces phrases d'un "Charlie" lancinant (et presque risible quand on a en tête l'autre Charlie, "the Banana King"), Gail est à deux doigts de nous provoquer une indigestion de bons sentiments. Les dialogues sont quant à eux plutôt désespérants, et certainement pas à la hauteur de la place laissée à la voix off a priori bien faite (c'est la voix d'Al Pacino quand même).
Sans parler du suspense propre à un bon film du genre. Oui, j'ai bien saisi que le tout était de dépeindre l'impossibilité du héros à s'en sortir, d'échapper à son milieu comme à son destin et à son passé. Mais la tragédie ne prend pas. Le côté "crépusculaire" même peine à marcher. Ses rêves de vie simple, d'enfants et de location de voitures laissent sans voix tant il instillent de la mièvrerie dans un film censé être sombre, et tout ce mélo (suffisamment bien amené pour que la chute déjà prévisible, soit plus fracassante encore j'imagine) allié à la bonté de Carlito rend tout simplement la noirceur du contexte déplacée voir étrange.
Alors oui, c'est un film sur la loyauté, sur la liberté, sur l'amour peut-être aussi, mais toutes ces belles promesses sont noyées dans le prévisible et le répétitif, où jusqu'à la fin, on ne cesse de se répéter : oui, ok, c'est bon, on a compris ! Un monde peuplé de lâches, de traitres, de corrompus qui ne laisse aucune place à l'espoir et à la rédemption d'accord mais à mon (humble) point de vue, Le Mouchard de Ford (pour ne donner qu'un exemple) accède à un tragique bien plus bluffant en nous prenant aux tripes et a finalement déjà dit beaucoup et mieux sur la question.
Alors, amateure de films noirs, de gansters, de mafia et d'Al Pacino, j'avais tout pour être conquise mais c'était sans compter une magie qui ne prend pas, un pitch qui m'ennuie, et finalement une déception cuisante, qui d'abord m'a laissé sans voix (et si je n'avais pas compris le génie du film ?) pour enfin me pousser à prendre la peine d'exprimer un contre point de vue, voir une incompréhension, qu'il m'a paru nécessaire d'apporter.