Les habitants du petit village de la Drôme où le dénommé Joseph Ferdinand Cheval a vécu ne pouvaient pas imaginer que leur concitoyen un peu fêlé serait un jour célèbre dans le monde entier, lui le facteur solitaire et inapte aux relations sociales. Le titre du film qui lui est consacré dit vrai avec une naïveté qui ressemble à ce qu'était le personnage : l'histoire du Facteur Cheval est proprement incroyable. L'édification de ce Palais idéal, monument dédié à sa fille Alice, est une sorte de Taj Mahal de l'art brut, construit en solitaire sur son temps libre par un homme qui parcourait plus de trente kilomètres par jour dans sa tournée de facteur. Qu'importe si certains voient un certain académisme dans la mise en scène de Nils Tavernier et si des libertés sont prises avec la vérité historique, le film est un bel hommage à la volonté humaine et au caractère singulier de celui qui était autant un artiste qu'un artisan, seulement mû par l'obstination et l'envie d'exprimer des sentiments forts autrement que par des mots pour lesquels notre employé des Postes n'était pas du tout doué. Oui, L'incroyable histoire du Facteur Cheval est un film qui a quelque chose d'un peu utopique et peu réaliste mais il ressemble en cela au drômois qui a bâti le palais d'un rêveur. Jacques Gamblin est littéralement habité par le rôle réussissant à conserver à Cheval le mystère de sa vraie personnalité. Avec une Laetitia Casta, formidable, à ses côtés, protectrice et consolatrice de cette "belle âme." On ne sait si, dans la réalité, la femme du facteur, était autant lumineuse et empathique mais à vrai dire cela n'a aucune espèce d'importance.