Dans The enforcer, aka L'inspecteur ne renonce jamais, tout comme dans Magnum force, on ne fait nullement mention des évènements à la fin du film précédent. Harry est toujours dans la police, on ne sait par quel miracle.
Et tout comme pour Magnum force, j'ai l'impression que The enforcer a été écrit en réponse aux critiques faite à propos du film d'avant. Je n'ai pas retrouvé de critiques de l'époque en attestant, mais à mon avis, on a certainement pointé du doigt le sexisme de Magnum force, au vu de ses personnages féminins réduits à des objets sexuels.
Dans The enforcer, pour une fois, le point important, ce n'est pas l'identité du méchant, mais celle du partenaire de l'inspecteur Harry, une femme : l'inspecteur Kate Moore.
Selon des directives du maire de San Francisco, il faut plus de femmes dans les rangs de la police.
Forcément, ça dérange Harry, mais les scénaristes ont eu l'intelligence de prévoir ce qu'on risquait de reprocher au film. Ainsi lors de l'entretien de la nouvelle recrue, ce qui dérange Callahan, ce n'est pas le sexe de la candidate, comme veut le croire ce personnage de caricature féministe présente dans la même pièce, mais son inexpérience.
Une fois que Moore est sur le terrain, Harry ne lui fait pas de cadeaux, mais quand on y repense, il a toujours été dur avec tous ses partenaires...
Moore est loin d'être aussi expérimentée et forte qu'Harry, mais elle est pleine de détermination.
Dans The enforcer, le personnage féminin est à l’opposé total de ce qu’on voit dans Magnum force ou d’autres films d’Eastwood comme Un shérif à New York : elle existe non pas pour mettre en valeur le héros en lui succombant, mais elle a une réelle personnalité, et gagne aussi bien le respect du spectateur que du héros.
Je m’attendais tout de même réellement à ce que le duo finisse ensemble, non seulement car c’est le schéma classique mais aussi en raison de quelques signes. Callahan et Moore finissent par se comprendre, la fille est assez jolie, et il y a ce dialogue avec quelques allusions sexuelles qui brouille les pistes (notez que pour la première fois dans la saga, quelqu’un fait allusion au symbole phallique qu’est le Magnum que brandit sans cesse Harry, qui veut le plus gros flingue possible et rien d’autre). Finalement il ne se passe rien entre eux, et je crois que ça force encore plus le respect pour Moore.
La seule scène de sexe dans ce film-ci est là à des fins comiques.

Les méchants par contre sont largement moins intéressants, il leur manque quelque chose de spécial pour sortir du lot, surtout par rapport aux adversaires des deux premiers films. Il s’agit ici d’un groupe de militants qui volent des armes et, ce faisant, laissent des cadavres derrière eux, en prétendant défendre une cause. Il y a par contre parmi eux un homme qui semble être là juste pour le goût du meurtre. Mais qu’ils croient ou non en leur cause, à aucun moment du film on n’apprend leurs revendications ! C’est un assez gros problème, au final le groupe n’a aucune identité particulière.
On s’ennuie un peu, du coup. Heureusement, il y a Harry, jamais à courts de répliques géniales, qui ne cessent de me faire éclater de rire.
Les scénaristes ont aussi encore trouvé des situations nouvelles dans lesquelles il est drôle de voir Callahan. On le découvre dans un bordel, se faisant passer pour un client, ou avoir affaire à un homme faisant une crise cardiaque.
En dehors de l’enquête au centre de l’intrigue, on voit toujours Harry sur de petites affaires. Dans The enforcer, il y a cette scène incongrue et très drôle où le héros est confronté à un arnaqueur dans un restaurant. On a l’impression de voir la routine du personnage, si rodé qu’il ne se fait avoir par aucune mascarade, et qu’il connaît toutes les petites frappes de San Francisco. Cette fois, il passe l’éponge, à moitié amusé par la ruse de l’escroc. C’est important de le souligner, parce qu’on peut voir là un Harry assez indulgent, qui résout un problème sans tirer un seul coup de feu.
Bon par contre, cette fois, quand Harry Callahan règle leur compte à de vrais criminels, il fait encore plus dans la démesure. Le fameux inspecteur se rapproche un peu plus des héros d’action d’aujourd’hui pour le coup, il démolit tout en se foutant des conséquences.
Certes c’est fun, mais on s’éloigne encore plus du réalisme. Le film empire même les choses quand Harry cherche à se défendre, avec des propos assez absurdes. Il rappelle à son supérieur qu’on lui a dit que la priorité était de se débarrasser des truands, et qu’il ne peut pas le faire uniquement en leur criant "trick or treat"…
Mais en dépit d’un ton moins sérieux qu’avant dans certaines scènes, il y a quand même quelques moments dramatiques qui fonctionnent. Plus que dans les autres films, j’ai vraiment eu le sentiment de voir un Harry esseulé, incompris.
C’est pourtant dans le premier Dirty Harry que la BO était la plus nostalgique, dans mes souvenirs. Je n’ai pas parlé des musiques jusque là, mais Lalo Schifrin avait fait de bonnes compositions pour les deux premiers films ; sur The enforcer, il est remplacé par Jerry Fielding, qui a créé un thème musical un peu plus dynamique, plus marquant aussi. C’est en tout cas celui qui a été utilisé pour la parodie des Nuls, "Dirty Henry".
A la réalisation, il y a un habitué d’Eastwood, James Fargo. Sous sa direction, on dirait qu’il y a plus de violence visuelle. On nous montre les plaies desquelles s’écoule le sang, de plus grosses éclaboussures d’hémoglobine, des impacts de fusil à pompe dans le corps, … Les effets spéciaux sont assez bons d’ailleurs.

J’avais adoré The enforcer la première fois que je l’avais vu, mais là ses défauts me sont apparus plus clairement. Il y a des points intéressants, mais on sent que certains aspects du scénario ont été bâclés, comme pour la caractérisation des méchants, le retour surprise de Kate Moore à un moment donné, et cette fin qui tombe à plat.


Avant de terminer, deux détails à noter :
-J’ai cru un instant que le personnage de Mustapha était joué par Fred Williamson, alors qu’en fait il s’agit d’Albert Popwell, qui jouait déjà un des braqueurs dans L’inspecteur Harry et le mac dans Magnum force ! Je n’avais jamais fait le rapprochement. Autre chose curieuse : il a joué dans Un shérif à New York, et dans la série éponyme, qui n’a pourtant aucun lien avec le film et ne porte même pas le même titre en VO.
-Il y a un personnage secondaire de policier qui s’appelle "Pusseau". That’s it.
Wykydtron IV

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