Après Mario Bava (La Femme qui en savait trop et Six femmes pour l’assassin), Dario Argento définit, avec son premier film, les codes du giallo qui fera le bonheur du cinéma italien dans les années 70. Six ans après Mario Bava, Dario Argento reprend l’archétype du tueur tout de cuir vêtu, utilisant l’arme blanche pour commettre ses affreux méfaits. L’enquête qui domine le film s’achève par la révélation surprise de l’identité du tueur façon whodunit. À ces éléments, Dario Argento intègre des éléments plus modernes avec des meurtres plus violents, une atmosphère plus lourde et une réalisation plus léchée. Caméra subjective, voix murmurée et folie latente donnent à l’ensemble un cadre plus terrorisant. Mais la véritable touche apportée ici est le point de vue redoublé et l’interrogation sur l’image, signature du travail de Dario Argento que reprendra, notamment, Brian de Palma.


Comme on le retrouvera dans la suite de son œuvre (Les Frissons de l’angoisse, Ténèbres, Trauma), le thème de l’image qui ment au personnage principal (et donc au spectateur) empêche la résolution de l’intrigue. Prolongement du Blow up, ce thème, qui devient l’enjeu du récit, fera le succès de nombreux films. À ce thème se rajoute toujours celui du point de vue redoublé. Le personnage principal assiste à un meurtre mais il ne peut intervenir, mettant ainsi en scène le spectateur lui-même qui, dès le lever de rideau, est condamné à ne jamais pouvoir intervenir. L’intégration de ce thème dans le cinéma de Dario Argento est d’autant plus fort dans ce premier film que le personnage principal se retrouve pris au piège entre deux baies vitrées. Nous assistons donc à la naissance d’un genre et d’un réalisateur dans cet Oiseau au plumage de cristal qui sera une référence pour beaucoup de réalisateurs italiens.


Tout n’y est pas réussi (le scénario n’est pas totalement maîtrisé et les atmosphères pas aussi terrifiantes que celles qui suivront) mais Dario Argento parvient à mêler film de genre et film d’auteur. Le soin apporté à la réalisation, la pertinence de la musique d’Ennio Morricone et la qualité de l’interprétation ne peuvent en faire un banal film d’exploitation. Si l’ensemble a un peu vieilli, la réussite de ce premier effort est incontestable. Son influence sur le cinéma sera considérable.


Créée

le 25 mai 2023

Critique lue 45 fois

7 j'aime

2 commentaires

Critique lue 45 fois

7
2

D'autres avis sur L'Oiseau au plumage de cristal

L'Oiseau au plumage de cristal
Pravda
8

Critique de L'Oiseau au plumage de cristal par Pravda

Premier giallo du réalisateur italien, L'oiseau au plumage de cristal est déjà très représentatif de ce que sera le cinéma de Dario Argento. Dans ce giallo, genre cinématographique très en vogue...

le 5 oct. 2012

32 j'aime

3

L'Oiseau au plumage de cristal
pierrick_D_
7

Critique de L'Oiseau au plumage de cristal par pierrick_D_

Un écrivain américain vivant à Rome est un soir témoin de la tentative de meurtre d'une femme.L'agresseur semble être l'insaisissable serial killer qui a déjà sévi plusieurs fois et le yankee se met...

le 17 mai 2020

12 j'aime

3

L'Oiseau au plumage de cristal
DarkParadise
8

Critique de L'Oiseau au plumage de cristal par DarkParadise

Première réalisation officielle du grand Dario Argento (que j'apprécie énormément), c'est avec ce film que celui-ci "travaille" pour la première fois les bases du genre "Giallo", qui furent initiées...

le 3 sept. 2012

12 j'aime

Du même critique

L'Iris blanc - Astérix, tome 40
Play-It-Again-Seb
4

La philosophie sur le comptoir

Aïe, aïe, aïe... L'arrivée de Fabrice Caro en lieu et place de Jean-Yves Ferri qui venait, à mon sens, de signer son meilleur Astérix dans le texte, était pourtant annoncée comme une bonne nouvelle...

le 15 nov. 2023

22 j'aime

22

L'Emmerdeur
Play-It-Again-Seb
9

Pignon, ce roi des emmerdeurs

Premier film mettant en scène François Pignon, L’Emmerdeur est déjà un aboutissement. Parfaitement construit, le scénario est concis, dynamique et toujours capable de créer de nouvelles péripéties...

le 12 août 2022

22 j'aime

10