Après plus de 15 ans d'errances (on va dire La haine), Mathieu Kassovitz revient enfin avec un très bon film, qui est consacré à la prise d'otages à Ouvéa durant les présidentielles de 1988.
Je n'avais jamais entendu parler de cette histoire, mais il faut dire qu'elle est assez complexe, car le rôle de l'armée française face aux kanaks est clairement remise en cause. Kassovitz, qui joue le rôle principal, engage le point de vue de son personnage, Franck Legorju.
Le film frappe par sa sécheresse de ton qui m'ont rappelé d'autres titres comme Code 465 ou La 317e section, des films de guerre, mais sans qu'il y ait forcément de l'action à tout bout de champ. Ici, il est surtout question de diplomatie entre deux partis qui ne semblent se comprendre, alors que des otages se trouvent entre les deux.
On pourra certes reprocher à Kassovitz d'être trop présent à l'écran, mais quelle mise en scène ! Il est rare que je dise ça d'un film français, mais voilà quelqu'un qui ose prendre des risques, quitte à déstabiliser, et mine de rien, il sait se servir de sa caméra. A en juger par les confrontations qui sonnent comme des scènes d'action ou le débarquement final, avec un plan-séquence de malade filmé à la manière d'un reportage de guerre pris sur le vif, on ne peut pas dire que Kassovitz manque d'ambition.
Après, il est dommage que l'acteur soit aussi seul, et qu'il n'ait pas un vrai contre-point, car son point de vue sur l'histoire d'Ouvéa n'est pas objectif en soi.
On remarque aussi un travail intéressant sur la bande-son ; la musique est à 99% absente, et on entend juste des gongs comme pour marquer de plus en plus l'horreur qui attend les soldats à la fin du film. On peut penser vite fait à Apocalypse Now, avec les plans des hélicos au ralenti ou le visage de Kassovitz qui est proche des pâles d'un ventilateur, mais ça n'enlève pas à l'identité propre du film.
Je ne sais pas si ce sont les dires du réalisateur sur Internet ou une mauvaise date de sortie, mais le film a subi un échec cuisant ; il est dommage qu'une telle ambition soit ainsi sanctionnée.