Adapté d'une pièce de théâtre, de Sébastien Thiery, ce premier film au sujet tabou en amusera certains bien heureusement. Laurent Lafitte qui s'affirme en tant qu'acteur nous prouve qu'avec plus de confiance, son prochain film évitera peut-être cet aspect poussif, pas toujours très fin, et un tantinet maladroit par une mise en scène oscillant entre critique sociale et envolées oniriques sans bien creuser l'un ou l'autre, mais on apprécie cet exercice bienvenu dans le milieu cinématographique aseptisé.
Son cœur cosmique ayant cessé de battre Jean-Louis doit prendre en photo le vagin de sa mère, comprendre ses blocages et se remettre à vivre. Qu'on se le dise, en demandant à sa mère de se prendre en photo, de la mettre sous pli et de la faire passer à une gourou voyante et peu commode, on aurait évité bien des complications, mais l'affaire aurait été vite pliée.
Si le film aura tendance à ne pas être toujours en phase avec son humour, le parti pris outrancier n'est pas bien méchant. Le film souffre pourtant d'une certaine redondance de gags à accentuer tous les caractères monstrueux, où chacun en prend pour son grade, mais les personnages bien souvent jubilatoires par ce qu'ils révèlent de nos comportements et des acteurs plutôt sobres et inspirés contribuent à une certaine réussite. Si nous n'avons pas l'éternel repas et verres de vins millésimés, nous y retrouvons un couple de bourgeois, aux préoccupations bien terre-à-terre et les discussions semi-philosophiques du vide nettement plus jouissives, ici. Critique a minima sociale, points de vue sur le racisme et ses subtilités et la prise de conscience qui nous verra rassurés, lorsque Jean-Louis s'interrogera sur la condition de son chat, subissant une vie de misère auprès de ses humains en pointant son syndrome de Stockholm. Les réflexions souvent inutiles et hors propos lors de ses échanges avec son ami vétérinaire, (Vincent Macaigne) dans un restaurant japonais tenu par un chinois, viennent ajouter au décalage. On attend tous à la fin du repas nos petits verres de saké pour y découvrir la surprise du fond, chacun le sait, nous avons tous nos priorités.
On s'amuse alors un peu bêtement de ces dialogues bien sentis, que ce soit ceux cinglants d'une maman d'amour qui n'en a pas tant que ça, avec une déclinaison dévastatrice de tous ses actes peu recommandables à en accuser son fils sans vergogne, et qui nous confirmera si besoin est, de l'immense talent d'Hélène Vincent. De la très en forme et dictatoriale, Nicole Garcia, a la voix toujours si profonde, et des réparties de Karine Viard et on remercie son personnage de parler de vagin avec tout le naturel qu'il se doit et tout le talent qu'on lui connaît. Tout est donc affaire de subjectivité et on s'amuse encore de cette fête des voisins revisitée, tous à poil, pour marquer la volonté de réussite de tout notre petit monde prêt à toutes les bassesses, balayant le minimum de politesse. Rabaissée à un appel au viol par les plus rigides, la scène de dérapage de Macaigne -survolté par son travail personnel à réussir au moins une action dans sa vie en tentant l'ultime don de soi- marquerait plutôt la limite d'âge à s'autoriser le plaisir, au lieu du beau pied de nez à y voir une Hélène Vincent assaillie par une montée de désir.
Curieusement, sans faire grincer des dents cette fois-ci, nos deux compères sexe à sexe et en gros plan ne semblent provoquer aucune réaction outrée pour cette scène décomplexée.
Les plus aventureux et qui n'ont peur de rien, adeptes de l'art dans tous ses états, se souviendront de la peinture de son amoureuse par Gustave Courbet et qui prête son nom au film, et un siècle plus tard, on aurait pu espérer que le sexe d'une femme à défaut d'être caché devrait se défaire du ternissement de son image sans pousser au sacrilège et sans cette hypocrisie toujours si déplaisante.
De la même manière que Facebook ne fait pas la différence entre l'art et la pornographie, en y supprimant la peinture sur son site, mais en autorisant par ailleurs la violence du harcèlement, ou la confusion qu'ont entretenue les filles de K.Viard sur son métier, les réactions offusquées pour ce film, démontrent qu'aujourd'hui encore, le blocage sur le sexe que l'on ne saurait voir, a encore de l'avenir devant lui, venant dénaturer chez certains un récit à visée humoristique.