De prime abord, j'aimerais imaginer, à la blague, qu'il s'agit d'un spin-off sur le cousin grizzly canadien de Paddington, si dans les films de ce dernier on y voyait plus de boyaux d'animaux.
Cela dit, je soupçonnais au départ que ce film jouerait avec mes sentiments, car voir des animaux en chair et en os à l'écran (lire avoir un ourson comme protagoniste) c'est "mignon" par défaut. Du moins, je ne m'estime pas être le seul à aimer les animaux, bien que je consomme ici et là occasionnellement de la viande (j'assume très bien cette dissonance cognitive).
Par la suite, après avoir décroché de mon sourire niais sur l'ourson qui contemple un papillon, je remarque que les émotions dudit animal semblent calculé, très calculé à vrai dire. Après, je ne vais pas accuser Annaud de supercherie, car on ne tourne pas facilement une fiction avec des vrais ours (ici des grizzlys) sans les avoir entraînés, question de sécurité oblige(!). Additionné avec le côté très sophistiqué de la réalisation, cette impression de film truqué, voir très écrit, se renforce. Donc, est-ce la forme entre en dichotomie avec le cadre naturel du sujet? Possiblement, mais ça passe. Disons qu'au final, j'ai plus l'impression qu'Annaud voulait se faire une performance, à savoir tenir un film avec des vrais grizzlys, que faire un grand film.
En dehors ça, je suis un peu déçu que le film soit tourné en Europe (soit dans les Dolomites italiennes et autrichiennes si j'ai bien fait mes recherches) et non en Colombie britannique, bien que ça n'enlève rien à la beauté des paysages naturelles qu'on voit à l'écran. La direction photo est (très) jolie aussi, mais un traitement plus rugueux et moins sophistiqué aurait possiblement arrivé à sublimer plusieurs scènes.
Côté narratif, c'est somme toute un film assez classique qui se contente de livrer une histoire de filiation en toute simplicité, ce qui ne me déplaît pas ici. On a cet ourson qui devient orphelin après que sa mère ait été écrasé par un gros rocher (moins classe que dans Bambi me dira-t-on) et qui va chercher chez un grizzly mâle protection et modèle à suivre. Idée qui semble être soutenu par la présence des chasseurs qui sont père et fils si j'ai bien suivi le film, mais je suis peut-être dans le champ de patate aussi. Bref, je n'ai pas écouté le film pour ses thèmes, je laisse ça aux plus académiques que moi si ça leur dit.
N'empêche, j'aimerais revenir sur les émotions de l'ourson. Si je suis convaincu que les animaux ont des sentiments, l'ourson semblent vivre des sentiments un peu plus humanisés qu'à la normale, comme quoi même entraîné l'ourson fini par imiter des sentiments humains que son propre comportement à l'état sauvage (toute proportion gardée, je ne veux pas exagérer mes propos). Faudrait que je prenne une bière avec une zoologiste pour qu'elle m'explique davantage le comportement animal dans de tels contextes (cinéma, coaching d'interprétation, etc.).
On a droit à 3 scènes avec de l'animation en stop-motion. D'abord, deux scènes oniriques très déroutantes par le contraste créée par la superficialité cherchée desdits rêves et le cadre dit naturel du reste, d'autant plus que ce sont des songes de l'ourson. Est-ce qu'un rêve animal est semblable à celui d'un humain? Une autre question à poser à une zoologiste après deux bières j'imagine. Et la troisième scène d'animation, la plus absurde et décrochante du film, est celle où l'on voit le petit ourson consommer des champignons sauvages rouges avec des points blancs (des amanites tue-mouches, merci Wikipédia!) et se met à halluciner un champignon qui devient un papillon jaune qu'il contemple d'un abrutissement très sympathique. J'imagine Timothy Leary et/ou Carlos Castaneda ressusciter et mourir une seconde fois en riant agressivement.
J'aimerais terminer sur une note pas très pertinente (c'est selon), mais à côté des bruits mignons de l'ourson, ça niaise absolument pas quand on entend les grognements et hurlements des ours avant de passer à l'acte de fornication. Pis aussi, quand un grizzly te hurle dessus à quelques centimètres de ton corps. Prenez garde, car si en Afrique le lion est roi, c'est le grizzly qui est roi dans les montagnes Rocheuses canadiennes.
P.S.: Tinder n'est vraiment pas la place pour rencontrer de jolies zoologistes, dommage.