Jacques Demy nous invite au pays du vice du jeu, en se servant d’un jeune homme dans le besoin qui découvre, explore et se fait envoûter dans ce qui vacille entre passion et addiction. Tant dans les ambiances fiévreuses des casinos de la Baie des Anges de Nice que dans sa relation amoureuse et soudaine avec une fascinante habituée, l’analogie avec une toxicomanie est partout.
Effrayés d’une vie sans risque ni surprise ni émotions fortes, notre couple nous embarque dans leurs tribulations improvisées, capable de jouer leur va-tout à chaque instant, juste pour vibrer, se payer le luxe de la désinvolture absolue, jonglant entre la belle vie facile et opulente et le dépouillement endetté bien moins illusoire, baladés avec et malgré eux entre soudaineté et chronicité, entre euphories et perditions. Jouant leur vie au-dessus du hasard, pariant à la roulette leur bon sens, leurs réalités, leurs vertus, famille et même l’enfant de la nana, ce film de 1962 reste paradoxalement un cri d’alarme face à l’avilissement jouissif de cet état fiévreux, de cette obsession de gagner, cette jubilation du pari, de l’insolence et de la valse de la chance.