Il y a une telle fraîcheur dans ce film !
D'abord, les actrices sont merveilleuses : Cécile de France est, à mon avis, dans son meilleur rôle depuis la série des Klapish (L'auberge espagnole etc.) : elle est lumineuse et je trouve que les cheveux longs blonds et les quelques rides au coin de la bouche lui donnent une grande sensualité et une maturité nouvelle.
Izia Higelin est une vraie révélation, dans un premier grand rôle à sa mesure.
C'est l'histoire d'une rencontre improbable sur le trottoir de Paris, d'un Amour naissant et ensuite d'une flamme qui ne cesse d'animer ces deux jeunes femmes, au delà des différences sociales et culturelles.
Le contexte est aussi très intéressant : le début des années années 70 en France, avec le décalage entre Paris et la campagne provinciale : les premières luttes féministes à Paris, le travail des champs et la femme restée servile à son homme, à la campagne.
Pour rendre La Belle saison aussi réaliste et authentique que possible, la réalisatrice s'est énormément documentée sur les mouvements féministes des années 70. Ainsi, elle a visionné de nombreuses vidéos de Carole Roussopoulos, qui a notamment filmé le premier défilé homosexuel ayant eu lieu le 1er Mai 1970. Elle a également regardé des films militants que cette dernière avait coréalisé avec Delphine Seyrig. D'ailleurs, les prénoms des deux héroïnes du film, sont des hommages à ces deux ferventes défenseures des droits des femmes.
Je trouve que les seconds rôles sont très bien traités, notamment celui joué par Noémie Lvovsky qui campe une mère traditionnelle, aimante mais enfermée dans ses préjugés. Elle n’accepte pas les "dégueulasseries" que fait sa fille avec Carole et rejette violemment cette dernière lorsqu'elle apprend qu'elle est amoureuse de sa fille. C'est incompréhension, la peur de l'inconnu qui guide sa réaction très forte de rejet. Noémie Lvovsky est, comme à son habitude, particulièrement juste dans ce rôle.
Les personnages masculins ne sont pas caricaturaux, plutôt bienveillants, bien que Manuel, le compagnon de Carole n'hésite pas à la mettre devant ses contradictions : comment peut-elle se battre pour la liberté des femmes et être aussi dépendante affectivement de cette femme qu'elle aime ?
Catherine Corsini a mis longtemps à faire son coming-out. Comme le personnage de Delphine, elle avait du mal à assumer son homosexualité. Elle dit d'ailleurs qu'il y a un peu d'elle dans les deux personnages principaux.
Elle avait pourtant déjà abordé ce thème dans ses films précédents, mais là elle décide d'en faire son thème principal et elle filme des scènes de sexualité (d'ailleurs très sensuelles).
Même le film de Kechiche, La vie d'Adèle, ne l'a pas dissuadé de faire son film, même si elle reconnait que quand elle l'a vu, elle s'est quand même posé la question de savoir si elle devait poursuivre ou non son projet. Et puis sa réflexion a été de dire qu'il n'y avait pas beaucoup de films sur l'amour lesbien et quand plus, ce sujet devait être absolument abordé par les réalisatrices.
Et elle a bien eu raison tant ce film est une réussite à plus d'un titre !
Juste un petit mot sur la BO : on y trouve avec bonheur deux titres de la grande Janis Joplin, parfaitement appropriés pour illustrer cette période des seventies.