Il est curieux de voir, à seulement quelques mois d'intervalle, deux adaptations de La bête dans la jungle, la nouvelle de Henry James. Celle de Patric Chiha était déjà très libre, et conceptuelle, mais que dire de celle de Bertrand Bonello, conjuguée au futur antérieur, qui nous trimballe entre trois époques différentes. A noter quand même une paire d'étranges similitudes entre les deux versions : les scènes en boîtes de nuit et le minois de Léa Seydoux (globalement peu convaincante), à plusieurs reprises, qui ressemble d'assez près à celui d'Anaïs Demoustier. La question que l'on se pose devant La Bête est évidente : pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? Pour déconcerter le spectateur ou plutôt aiguiser sa perspicacité ? Si l'on veut, oui, mais le fond n'est franchement pas suffisant pour retenir l'attention, le thème de l'intelligence artificielle servant avant tout de prétexte pour une narration qui semble largement manquer d'enjeux. En enlevant l'épisode concernant 2014, le film aurait sans doute acquis un peu plus de tonicité, eu égard à une longueur excessive de près de 150 minutes. Il faut bien en convenir, sans la prestation impressionnante de George McKay, qui a remplacé le regretté Gaspard Ulliel, La Bête serait bien difficile à regarder. Bertrand Bonello est un cinéaste atypique qui a le mérite de tenter continuellement des paris formels mais il ne peut pas réussir à tous les coups.