Premier long métrage de Jean-Charles Hue La BM du Seigneur parvient - de manière assez admirable de concision savante et paradoxalement spontanée - à saisir l'air d'une communauté et des temps contemporains. Porté en grande partie par la présence de l'imposant ( et émouvant ) Frédéric Dorkel ce drame au coeur duquel foi et obscurantisme social se mêlent de façon élégamment homogène frappe par sa dimension largement vériste, auscultant derrière son regard faussement anodin les petites possibilités et les grandes limites du peuple yéniche...
Tourné dans la langue des ces gens du voyage criants de vérité La BM du Seigneur donne de ce point de vue un bel avant-goût de ce que Jean-Charles Hue réalisera quatre ans plus tard avec le percutant Mange tes Morts. Argotique et musical le langage yéniche met en valeur l'esprit d'appartenance et de loyauté de cette communauté vivant de chourave et de picole, le film étant souvent tourné au plus près des corps et des heurts de ces figures cinégéniques en paradoxe.
Éventuel produit atavique des films de Jean Rouch et de son célèbre cinéma-vérité La BM du Seigneur possède la fraîcheur et la sincérité des premiers films ; néanmoins moins abouti que le film suivant de son auteur-réalisateur il n'en demeure pas moins assez indispensable dans sa retranscription sociale présentée sans complaisance devant nos yeux de spectateurs fascinés et émus. Une belle surprise à voir à coup sûr !