C'est un film de Claude Chabrol adapté d'un roman de Georges Simenon. C'est en 1972. Jean-Louis Trintignant tient le rôle principal. Stéphane Audran interprète sa femme, Delphine Seyrig sa maîtresse. C'est un film à la lenteur chabrolienne, en apesanteur, un peu comme La femme infidèle ou Juste avant la nuit. Le film de Claude Chabrol n'existe pas, c'est un film de Mathieu Amalric.
La chambre bleue démarre admirablement puis perd son souffle. L'image, le cadre et la musique sont sublimes. Chaque plan est photographique. Le rythme imposé, les échos du passé revenant au présent, le fil narratif qui se dévoile peu à peu, les magnifiques scènes aux Sables-d'Olonne, le phrasé trintignanesque d'Amalric, le jeu un peu faux de Stéphanie Cléau, la figure terrienne de Léa Drucker, tout se conjugue pour nourrir un récit en dehors du temps, comme un rêve éveillé, troué de doutes, parsemé de fulgurances visuelles.
Puis le film se cogne à ses propres règles, s'enferme entre les quatre murs du bureau du juge d'instruction, donne trop au verbe et plus assez aux sens. Et même si les pistes demeurent brouillées, même si Amalric explose parfois, on attend la rupture de ton salutaire, la fracture, le chaos.
Mais le film tient sa ligne, s'y obstine et s'éteint à petit feu. Les scènes du tribunal nous secouent enfin, le jugement vécu comme une hallucination, Amalric/Julien la tête dans les mains, c'est un peu tard pour nous emporter.
Un bel essai, un indéniable sens cinématographique, mais un rythme qui lasse. La chambre bleue aurait pu être un film en état de grâce.