"Look me in the eyes. What do you see?"

Le poison sort de la bouche des enfants.
The Hunt pose le doigt sur une histoire qui n'est pas sans nous rappeler le scandale d'Outreau. Accusé d'attouchements par une petite fille mythomane, Lucas voit sa vie basculer, et le spectateur avec. On a beau deviner ce qui attend le personnage principal, dans ce petit village danois où tout le monde semble connaître tout le monde, la mesquinerie humaine continue de fasciner. Pire, le film ne s'attache pas uniquement à accuser les conséquences des rumeurs vives à se diffuser entre les jolis pavillons de banlieue. En effet, il souligne l'attitude de la directrice du jardin d'enfant, se recroquevillant derrière l'argument de la morale, de la transparence absolue, et de la sacro-sainte parole des enfants. La présomption d'innocence est bafouée, les premiers interrogatoires déviés, orientés. Les enfants ne sont pas les seuls mis en cause : on peut constater toute l'obsession morbide qui envahit les pensées de ceux qui voient d'un mauvais œil le sexe masculin dans un monde conquis par les femmes. On peut constater la doxa qui s'installe, le manque de compassion absolu envers un homme dont la vie se dissout, lentement. Réputation salie, bastonnades publiques, oui, The Hunt se déroule bien au XXIe siècle, dans l'un des pays que l'on nous érige au rang de modèle de morale par excellence. Vinterberg se complaît dans cette lucidité terrifiante sur les dérives d'un pays persuadé de bien faire, sans se soucier des parcours ruinés au prix d'un angélisme putride et mortifère.
Traumatisées par des dizaines d'affaires de pédophilie, de tortures et de meurtres sur mineurs, les sociétés occidentales semblent désormais toutes prêtes à jeter leur dévolu sur le premier coupable idéal venu, lisant des signes là où il n'y en a pas, se défiant de l'absence de preuve, des incohérences abyssales.


Votre réputation première ne comptera pas.
Votre place dans le village ne comptera pas.
Et si la rédemption existe, étincelante d'espoir, The Hunt nous ramène bien vite à la réalité, pour nous démontrer par a+b que la mémoire humaine, elle, s'obstine et n'oublie pas.

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le 11 févr. 2017

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SerenJager

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