La période espionnageophile qui précéda le lifting de James Bond n'en avait pas fini avec Von Sydow, qu'elle rappelle à elle pour cet ersatz d'histoire vraie passée à travers les grilles hypothétiques d'un thriller et sa scénarisation.
Tenant absolument à élever l'enquête au rang de la police militaire - estimant peut-être que la confrontation des deux mondes serait naturellement synonyme de plus de frissons -, le film arbore des répliques rendues puissantes par la carure de leurs énonciateurs. Il fallait bien ça, car elles ne servent guère que d'explications ou de remplissage ; du labyrinthe kafkaïen d'une investigation abracadabrante, on tombe très vite dans l'exclamation de substantifs niaiseux qui ne convainquent pas de l'utilité de leur existence.
On ne sortira pas l'excuse de l'émancipation artistique ; rien de nouveau dans l'idée, les codes employés sont aussi aisément déchiffrables que ceux dont le bon factotum policier avait la tâche dans le film. Trop politisé pour se rendre compte qu'il perd totalement de vue son sujet – quelque or volé –, Brass Target volette paresseusement de digression distrayante en approfondissement des caractères.
Il arrive au moins à donner un certain mouvement, une certaine épaisseur aux photos typiques qu'on étale sur le bureau de l'inspecteur ou du criminel. Mais aucun génie dans la recherche de l'exotisme chez les paysages suisso-allemands, ni vraiment d'intérêt dans une histoire qui cherche des "rallongis" pour arriver à des meurtres inévitables, qu'on connaît déjà comme si on était un prescient de Minority Report. Voilà d'ailleurs un anachronisme d'une piètreté comparable au film.
Quantième Art