Cliquetis des glaçons dans le vin… Orage qui tonne au loin, par-delà les poivrons… Crissement de chaises longues, que de vieux corps poussent, au bord d’une piscine sur laquelle il pleut. La Ciénaga, mes oreilles s’en souviendront !
Et pas seulement, c’est aussi du jamais vu ! Ces images, des « cadres-décadrés » pourrait-on dire, « méta-cadrés », comme si Lucrecia Martel zoomait de trop, après avoir minutieusement composé. Elle avouera en conférence se mettre au service des sons, dissimulant leurs sources, tout en encombrant la vue, pour mieux faire travailler l’ouïe. Nos sens re-découvrent une dimension du cinéma !
Plus que des images, ce sont des sensations qui marquent. Il y a déjà ce je-ne-sais-quoi, contenu, de la mère, qui menace d’exploser à tout instant. Ah… Quelle malaise en sa présence, et avec si peu – une paire de lunettes noires, les cicatrices sur sa poitrine, ses lèvres sèches et pincées… Et puis il y a cette torpeur qui embourbe tout, c’est comme dans un roman de Duras. L’ennui est donc fort parfois, mais il laisse une empreinte profonde.