L'un des films préférés de son auteur et on le comprend. Si on pourra toujours lui préférer « Métropolis » ou « L'Invraisemblable vérité », pour ne citer qu'eux, « La Cinquième victime » n'en est pas moins une oeuvre passionnante, l'une des rares à se montrer aussi cynique vis-à-vis du journalisme. Oh il y en a bien un ou deux qui ne sont pas antipathiques, mais ils n'en sont pas moins ambitieux, pour ne pas dire rarement brillants... Il suffit de voir le comportement très discutable d'Edward Mobley et John Day Griffith pour s'en persuader, alors qu'ils sont, avec la jolie Nancy Liggett, de loin les deux personnages « positifs » du récit. Cette description cinglante n'en laisse pas moins une place importante à l'enquête, bien menée et laissant un minimum de place à la personnalité du tueur, plutôt intéressante. A ce titre, Fritz Lang soulève une question terrifiante : à force de cynisme et d'absence de scrupule, certains à la rédaction de l'agence ne sont-ils pas pires que cet assassin avant tout malade, névrosé? Ce n'est toutefois qu'une mince partie de la richesse du film que je vous décris là : dialogues vifs, mise en scène inspirée, relation complexe et souvent fascinante entre les personnages... Le réalisateur de « M le Maudit » ne fait pas les choses à moitié en nous offrant un film aussi brillant qu'intelligent, d'autant qu'elle a beau présenter nombre de protagonistes, elle garde toujours une grande fluidité, sans doute justement parce que chacun a sa place et sa cohérence dans ce récit assez sombre pourtant non dénué d'humour... Et quand en plus de cela Lang réunit un casting proprement éblouissant (Dana Andrews, Rhonda Fleming, Thomas Mitchell, Vincent Price, George Sanders et Ida Lupino : qui dit mieux?), difficile d'avoir une quelconque réserve, si ce n'est que l'on pouvait peut-être s'attendre à quelque chose d'encore plus éblouissant et audacieux... Qu'importe, « La Cinquième victime » n'en est pas moins remarquable, faisant honneur à son statut de classique du film noir.