Le remake du film de Wes Craven par Alexandre Aja a eu une production très chaotique, si bien que sa réussite est peut-être un petit miracle. Initialement produit par les Weinstein, le projet tombe à l'eau lorsque les deux frangins se désistent (ils feront d'autres horreurs à Aja plus tard). Le projet récupéré par la Fox, certaines divergences entre le duo Aja / Grégory Levasseur et Craven sont apparues, le réalisateur français ayant dit depuis que les attentes de chacun n'étaient pas toujours les mêmes. Enfin, le tournage au Maroc fut particulièrement rude en raison de la chaleur, entraînant ainsi des difficultés potentielles pour les acteurs maquillés et les maquilleurs de chez KNB.
Le récit est dans l'ensemble très similaire à son aîné (1977) : famille isolée et cible d'une famille bien moins catholique, viol, meurtres, enlèvement, gendre prenant les armes. Mais les français décident de planter le film dans un contexte différent, à savoir de faire des cannibales des victimes d'essais nucléaires. Une thématique plutôt bien abordée à travers une famille défigurée à vie, créatures que l'on a essayé de cacher et qui finissent par se venger à leur manière.
Si Craven ne jugeait pas vraiment les cannibales du premier film, Aja se veut plus ambigu, montrant à la fois des victimes et des meurtriers, à l'exception de la petite dernière (Laura Ortiz). Les maquillages de KNB fonctionnent d'ailleurs du tonnerre.
Pour le reste, le réalisateur fait un gros clin d'oeil aux Chiens de paille (1971) avec ce gendre sans cesse dénigré et explosant dans le dernier acte, à l'image de Dustin Hoffman dans le film de Sam Peckinpah. C'est aussi la partie la plus gore du film, le trash étant présent dès le passage dans la caravane. Toutefois, le film n'est pas gore pour montrer du gore, le personnage d'Aaron Stanford ayant une évolution logique, le menant progressivement vers la folie.
On est donc loin de la vulgarité de la sequel signée Martin Weisz (2007), qui accumule les poncifs (les militaires bêtes comme choux joués par des membres de Classe Mannequin, du gore pour du gore, du trash pour du trash), en plus d'être mal filmée et montée. Comme quoi, éloigner un peu Craven du scénario du remake n'était pas une si mauvaise idée.
La colline a des yeux est un remake réussi et curieusement solaire par rapport à la plupart des remakes horrifiques de l'époque. Des films qui jouaient beaucoup trop sur une photographie noire et au mieux grise. L'occasion aussi pour Aja de commencer à faire son trou aux USA à ses risques et périls.