La Colline des hommes perdus est à classer parmi les grands films antimilitaristes de l'histoire du cinéma, aux côtés des Sentiers de la gloire, de Johnny s'en va en guerre et un des meilleurs films du cinéaste Lumet avec Douze Homme en Colère, Network, Une Après Midi de Chien.
La thématique central dans une majeure partie de sa filmographie est l'étude minutieuse du système social avec toujours en fond des personnages qui veulent déstructurer et/ou détruire ce système établi, cet ordre toujours mise en scène à travers des conflits humains (et hiérarchique). Dans ce film, Lumet décrit avec dureté et sobriété les conditions d'un univers militaire carcéral à la gouvernance totalitaire. Où s'épanouissent les brimades, les humiliations, les épreuves absurdes, entre tortures sadiques et insultes racistes où ici est condition de transformer les hommes en "jouet" pour les "disciplinés" soit-disant.
Visuellement, Lumet joue avec les contre-plongées pour traduire la domination des officiers-tyrans et avec les gros plans pour renforcer les sentiments de peur et d'oppression. Les plans sont fixes ou en travellings (ouverture à la grue magique), toujours centrés rigoureusement au poil près. Dramatiquement, il fait monter crescendo la tension jusqu'à un dénouement aussi intelligent que cruel, d'une logique implacable. Tout comme la musique qui accompagne par son absence cette intelligente corrélation de la mise en scène et du fond.
Cet ensemble se juxtapose avec le fait que ce film est un huis clos (la cellule) dans un huis clos plus impressionnant (la caserne). Mais la puissance inouïe de The Hill est avant tout due à ses comédiens. Les émotions qui nous animent avec violence surgissent de leurs échanges orageux, tout le revers de la guerre nous est asséné, nous réduisant à nous indigner en se sentant toujours plus impliqué (chapeau Sean Connery). Certains personnages restent tout de même caricaturaux (ce qui exercent l'ordre notamment) mais cela est en même temps choisi (comme l'a été pour Full Metal Jacket de Kubrick) pour appuyer la satire de ces chefs militaires et ouvrir la critique amplement assumée anti-militariste.
Comme à chaque fin de film (très bons ou moins bons) du Monsieur, à chaque fin de visionnage, on est interpellé à ce posé toujours une question sur la moralité des personnages (jamais sans fond de manichéisme) et ce revers en question du système établi pourvu que de défauts. C'est la marque d'un grand cinéaste