La Corde est un thriller en huis clos d’Alfred Hitchcock et son premier film en couleur. Basé sur une pièce de théâtre, le film tend à se rapprocher d’un long plan-séquence, mais il s’agit avant tout de plusieurs longs plans regroupés, avec des raccords pas toujours glorieux, et même parfois grossier (la caméra plonge dans le dos d’un personnage et en ressort une seconde après).
L’histoire raconte le pacte entre deux hommes qui, ayant tué un troisième sous le prétexte d’une théorie de classes supérieure et inférieure des hommes, donne une réception auprès de leur entourage sur les lieux du crime et en présence du cadavre dissimulé.
Le film a cela d’extraordinaire, qu’il nous met particulièrement mal à l’aise. Un sentiment exacerbé par l’horreur du discours ayant guidé le meurtre, qui se rapporte à une certaine idéologie hitlérienne des plus abjectes, mais aussi par le contexte qui prend en otage le spectateur: on se demande en effet si l’on souhaite ou non que le cadavre soit découvert, et cette idée a quelque chose de vertigineux. Une intention qui relève presque de l’exploit dans sa réussite, une fois encore, Hitchcock révèle tout son génie.
Même si l’intention fonctionne, je dois dire que le suspens ne m’a pas convaincu, en tout cas je ne classerais pas de moi-même ce film dans le genre Thriller. Sans doute parce que j’ai eu du mal à m’identifier aux personnages qui développent des concepts répugnants, et qui ne nous donnent pas envie de prendre en empathie, difficile de ressentir une tension, une attente pour ces protagonistes... L’enquête est aussi un peu poussive et manque de subtilité sur les faits.
Je n’aime pas particulièrement les huis clos et ce film fait les frais de ce modèle. Il ne se passe pas grand-chose, et on a une lourde impression de stagnation.
Les personnages sont géniaux. Leurs définitions peu communes en font le clou du spectacle. J’apprécie de plus en plus James Stewart, que je finis par trouver vraiment exceptionnel. Il est très bon, et à un charisme fou. Il est exceptionnel ici, dans le rôle de l’enquêteur perspicace, un peu gênant avec ses questions. Le duo John Dall et Farley Granger m’a convaincu, même si John Dall manque parfois de naturelle (mais bon en même temps il joue un meurtrier, tordu et cynique). Le reste du casting est aussi satisfaisant.
J’ai aimé ce film, mais je n’en ferais pas plus d’éloges. Peut-être que mon sentiment de gêne était justement le but recherché par le réalisateur, si c’est le cas, il a réussi son pari. Pour autant, j'ai préféré les autres films de Hitchcock que j'ai vue jusqu'à présent.