Dan, Kelliah et Louis sont trois étudiants d’une des meilleures écoles de commerce de France. Ils sont formés pour devenir l’élite de demain et sont bien décidés à passer rapidement de la théorie à la pratique. Alors que les lois du marché semblent s’appliquer jusqu’aux relations entre garçons et filles, ils vont transformer leur campus en lieu d’étude et d’expérimentation.
Des étudiants d’HEC ont monté, dans les années 1970, un réseau de prostitution. Cette légende urbaine, transformée et transformable à l’envi par ceux qui relaient des rumeurs qu’ils tiennent « de source sûre », offre un matériau idéal – à la fois sulfureux et critique à l’égard des élites prêtes à tout – pour une farce scabreuse. Dans le cas de La Crème de la crème, il s’agit de dépeindre la génération Y comme une armée d’enfants gâtés, incapables d’aimer, trop occupés à surfer sur YouPorn entre deux gueules de bois. Des gosses qui pensent que les sentiments se marchandent et s’achètent lorsqu’ils ne tombent pas du ciel. Vous l’avez compris : bonjour la nuance et le jugement à l’emporte-pièce.
Sexisme
A l’écran, cela donne un campus movie gentiment trash – on dit « bite-cul-couilles » mais on n’en montre pas, ou si peu – réunissant clichés sur les écoles de commerce (beuveries, coucheries et lacs du Connemaraaaaaaaaa) et personnages têtes à claque. La mise en scène ne fait pas preuve de plus de subtilité : par exemple, la démonstration que les relations amoureuses peuvent être appréhendées au prisme de la loi de l’offre et de la demande s’effectue dans les rayons d’un supermarché (rapport à la consommation, tout ça…). La proxénète en chef est une fille : maigre alibi pour contrecarrer le sexisme dont déborde La Crème de la crème. Toutes les filles sollicitées acceptent le deal, à savoir jouer les escorts-et-plus-si-gros-billet pour des étudiants davantage gâtés par leur portefeuille que par la nature. Aucune n’hésite plus de dix secondes, ni ne se révolte qu’on lui fasse une telle proposition : pénétrer dans l’univers sélect’ des soirées étudiantes est trop tentant lorsque l’on bosse chez Photocopie 3000.
Cucul-la-praline
Bien sûr, le parti pris de la farce est bien pratique pour se passer de toute nuance, la caricature excessive paraissant excuser le mauvais goût. Et puis, au fond, Kim Chapiron est un cœur tendre. Il met juste beaucoup de temps avant de révéler son jeu, l’avalanche de cynisme cache un torrent de romantisme. La fête du cul s’achève en after du cucul-la-praline. S’il ne juge à aucun moment les personnages (et surtout pas à la fin, chacun se fera sa morale), c’est pour mieux laisser exploser leur sensibilité roudoudou enfouie. L’éclat qui clôt le film ne manque pas de panache, mais il n’est pas assez puissant pour nous faire oublier la désagréable impression laissée par ce qui a précédé, sorte de prêchi-prêcha simpliste qui stigmatise une génération prétendument en perte de repères. Kim Chapiron est pourtant encore trop jeune pour les discours de vieux con.