Si E.T était breton
La Dernière Vie de Simon montre dès sa scène d’introduction tout son potentiel et ses influences : elles ne sont pas dans la Bretagne lumineuse qui sert de décor à l’intrigue de Léo Karmann et...
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le 27 janv. 2020
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Bon, La dernière vie de Simon a "fait du bien au cinéma français de genre" ou encore "fait plaisir à voir dans un cinéma qui fait fuir les 15-25 ans". Boarf.
Pour le premier argument, je ne suis pas d'accord. Le cinéma français de genre est toujours caractérisé comme étant fade, fragile, ne laissant pas la place à des créateurs prêts à tout casser. D'accord, entendons les arguments. Mais le cinéma de genre ne serait-il pas ce que les auteurs veulent bien en faire? La dernière vie de Simon est-ce le cinéma de genre français? Parce que si la réponse est positive, cela est bien bien triste. Tout d'abord parce que la référence (qui n'est pas un processus mauvais en soi) est mal utilisée et gâche tout le film. La référence à E.T se veut voyante. Encore une fois, pourquoi pas. Mais elle est absurde. Foutre de la lumière bleue la nuit, quand tous les adultes ont des lampes torches pour trouver un enfant, oui. Pour planter le décor d'une maison en pleine nuit, non. Les parents n'ont pas hébergé d'immigré, ils n'hébergent pas plus d'extraterrestre au fond du jardin. Donc non, la référence est inutile. Puis merde quoi, on est obligé de devoir se reposer sur le cinéma américain? Pourquoi le cinéma de genre ne crée pas ses propres mythes et références? Peut-être que c'est quelque chose d’intériorisé que nous, pauvres gueux français ne sommes pas des créateurs de mythes...
Ensuite, pour le fait que le jeune spectateur fuie la salle de cinéma, oui d'accord, mais les fera-on venir avec un film comme celui-ci? Non. Tout d'abord parce que Stranger Things propose groso modo pareil mais en un peu mieux, et la référence se veut déjà plus utile dans cette série. Ensuite parce que la fuite du cinéma français dépend de pleins de choses et défendre son film en Cinexpérience avec cet argument ne tient pas debout.
Bon, en vrai, le film n'est pas si terrible. Pour un premier film, il est même sympathique bien que très naïf alors que je n'apprécie pas cet effet dans les films. Puis les acteurs ne sont pas mauvais en soi. Le plus gênant dans le film est de devoir accepter trop d'incohérences, ce qui empêche tout attachement émotionnel. Pire, le personnage principal est devenu selon moi une créature diabolique. Je m'explique.
Tout d'abord, on accepte que le personnage ait un pouvoir hyper étrange: celui de prendre l'apparence de quelqu'un qu'il a touché. OK. Ce petit orphelin va donc prendre la place de son pote qui vient de mourir pour avoir une famille. OK, c'est super creepy et très fort de sa part. Pendant 10 ans, il va réussir à ne jamais se faire cramer et donc, à mentir à toute cette famille mais surtout, à réussir à rattraper tout un passé (le nom de papi et mamie, le nom des copains de l'école, les vacances de l'année dernière etc...). OK. Ensuite, il tombe amoureux de sa fausse soeur avec l'apparence de l'orphelin. OK. Et il continue ce jeu stupide en sachant que ça devra éclater. OK. Et il est conscient, lui, l'orphelin qui cherche tant l'amour, qu'il va E CLA TER une famille au sol, faire disparaître l'amour à jamais. OK. Bref, je n'arrive pas à croire que l'on puisse être si con à cause de l'amour et si diabolique.
Le film aurait gagné à développer la découverte de ce pouvoir super creepy auprès des parents et interroger la différence entre identité sociale, juridique et biologique. Mais on a préféré faire un "hommage" à un cinéma américain capable de créer ses propres références pour auto-alimenter son propre système. Et nous on les regarde avec des paillettes dans les yeux. Sauf que les paillettes devraient être dans MES yeux.
Je suis désolé de ne pas avoir aimé ce film, il était plein de bonne intention. C'était juste pas mon truc le fait de tirer sur la ficelle émotionnelle déjà tirée par Spielberg. Dommage!
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Créée
le 15 janv. 2020
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