Cinéaste engagé à qui l'on doit une pléthore de métrages percutants (R.A.S, Folle à Tuer, Dupon Lajoie, Le juge Fayard dit le Shériff, Allons z'enfants, le Prix du Danger, Canicule; rien que ça !), Yves Boisset ne perd rien de sa radicalité tranchée avec le drame policier La Femme Flic. Le récit traitant sans ambages de la pédopornographie avec un réalisme à la fois glauque et dérangeant, notamment eu égard de certaines séquences démonstratives quasi insoutenables (la découverte macabre d'une fillette à proximité du terril, les revues et photos de pornographie infantile que Miou Miou et son adjoint feuillètent sous notre témoignage). Tiré d'un fait-divers au cours duquel une fonctionnaire de police se donna la mort après avoir remonter la filière d'un important réseau pédophile, La Femme Flic adopte un parti-pris documenté pour nous immerger dans son enquête houleuse à travers la scénographie grisonnante du Nord de la France (ces cités minières entourées de corons à l'orée des années 80). Il s'agit donc ici de nous retracer méticuleusement l'investigation d'une jeune recrue raillée par sa hiérarchie machiste, quand bien même les citadins de la région observent d'un oeil médisant l'insigne policier souvent réduit à l'impuissance d'y résoudre leur enquête criminelle.
Dénonçant ouvertement la corruption et la lâcheté de la police et de ces juges lorsqu'il s'agit de lever le voile sur un réseau pédophile constitué de notables intouchables, La Femme Flic dégage un aigre sentiment d'injustice tant et si bien que l'histoire, éculée, se répète inlassablement à daigner mettre sous les verrous une élite embourgeoisée capable d'y soudoyer le système judiciaire et juridique afin d'inhumer leur scandale pédophile imparti à la prostitution juvénile. Ainsi, de par son scrupuleux réalisme sociétal particulièrement acrimonieux et la faculté maîtrisée de Boisset à nous familiariser auprès de personnages profondément humains, la Femme Flic est scandé de la prestance timorée de Miou-Miou inscrite dans la réserve, la fragilité et la pudeur en petit bout de femme taiseuse s'efforçant de se faire une place au sein de sa hiérarchie phallocrate. Pour autant délibérée à appréhender les criminels les plus notoires derrière le vernis précaire d'une cité minière appauvrie par le chômage, Miou Miou délivre un portrait de femme obtuse et prévenante au fil de son initiation à la constance de par sa soif de vérité. Outre des seconds-rôles communément irréprochables dans leur force tranquille et naturelle, on reste admiratif du jeu inhospitalier de Jean-Marc Thibault en commissaire castrateur forcé de duper sa partenaire afin de se plier à l'omerta et au chantage d'une élite politique.
Film coup de poing osant aborder dans un style docu-vérité la thématique si brulante de la pédophilie à l'orée des années 80, La Femme Flic demeure un implacable réquisitoire contre les manoeuvres policières, juridictionnelles et politiques étroitement liés à la connivence afin de préserver leur propre intérêt. Pleine de fragilité humaine à travers le témoignage de cette femme-flic en voie de rébellion, on reste d'autant plus captivé par le jeu réservé de Miou-Miou s'efforçant de parfaire son enquête avec une dignité maternelle.