« La fille à la valise » est le troisième film de Valerio Zurlini et sans doute son plus connu. Il offre à Claudia Cardinale un de ses plus beaux rôles. A côté de la star (à 23 ans, elle à déjà été l’interprète principale de quelques films fameux comme « Meutre à l’italienne » de Pietro Germi en 1959, « Le bel Antonio » de Mauro Bolognini et « Vent du Sud » d’Enzo Provenzale en 1960), le tout jeune jacques Perrin (19 ans) dont c’est le deuxième rôle important après « Verte moisson » de François Villiers en 1959. C’est aussi un premier rôle difficile face à une de plus belle femme du monde à la présence à l’écran superlative dont la beauté resplendissante s’accompagne d’une fragilité émouvante. Avec Leonardo Benvenuti, Piero De Bernardi, Enrico Medioli et Giuseppe Patroni Griffi, Zurlini va développer un scénario pour deux êtres qui évoluent en parallèle et dont la seule rencontre sera le moment d’amour partagé (pour Aïda aussi ?) sur la plage. Car le monde et ses conventions morales dictées par la différence de classe, empêchent toute liaison durable. Malgré son amour passionné pour cette jeune femme aussi douce que magnifique (à sa vue, tous les matous de l’histoire deviennent des loups en rut), Lorenzo ne lui offrira que de l’argent avant un dernier frôlement de main, aussi furtif qu’éphémère. La direction d’acteur de Zurlini fait merveille, exprimant tour à tour les tentatives d’Aïda pour sortir du rail mais en se brisant sans cesse sur un mur de verre. Face à elle le désarroi de Lorenzo se lit parfois dans ses yeux, parfois dans un léger frémissement des lèvres ou d’une légère crispation de la joue. Travaillant en long plan séquence dans le style d’Antonioni, photographié dans un noir et blanc d’anthologie et accompagné d’une bande son qui alterne les silences et des morceaux particulièrement bien utilisés (l’utilisation de « Deguelo » sur la danse égale l’intensité dans le « Rio Bravo » d’Howard Hawks, mais la cruauté en plus) le réalisateur nous entraîne dans la gaité forcée des deux personnages et leur bonheur fantasmé, dont la fin à chaque fois bute sur la réalité. Tout en douceur et d’une fluidité qui rappelle l’élégance d’un Minnelli (« L’horloge », « Comme un torrent ») mais sans sa cruauté tragique. Zurlini laisse toujours un espoir à ses personnages, mais pas dans cette relation plus virtuelle que réelle.