Tendu comme un roman de Green - laissez l'histoire s'infuser

Heureux hasard, étrange découverte que celle d’un ‘film de prestige’ à l’age entre deux époques : trop récent pour avoir l’air classique, trop ancien pour ne pas être un peu daté dans sa réalisation… Ces films à budget plus que raisonnable, à sujet littéraire, avec quelques grands noms, ces recettes qui articule doucement l’importance donné au sujet, l’investissement, le sérieux (et souvent l’envie de prix & autres Oscars) - ‘prestige movie’, donc, et l’odeur peut se faire un peu datée quand le film en question n’atteint pas le rang de chef d’oeuvre.


Difficile de ne pas noter les petits détails, les petits ingrédients du prestige movie quand se déroule ce film. Il y a même des accents britanniques de bon ton, il y a même un narrateur écrivain tapant à la machine ; il y a même aussi quelques scènes très passionnelles, avec peau blanche de Fiennes, mouvements du bassin et poitrine rose de Moore - un peu de sexe doit donner un peu de piquant à un prestige movie équilibré.


Cependant… Par delà le regard un peu acide devant les pièces du puzzle de prestige, l’histoire prend, par la grâce du support littéraire, le beau texte de Graham Greene. Le léger faux-rythme et les tics prestige deviennent alors de simples briques de l’histoire, et relèvent autant d’un ton britannique des années 40, le flegme courageux s’avançant à la guerre, subissant les bombardements de la bataille d’Angleterre. Le tic de fabrication fait sens, ou du moins se glisse dans une crédibilité de ton convaincante, on se laisse emporter dans cette adultère, cette passion à démêler, et son détective privé cockney pittoresque et sympathique. On suit, l’émotion prend, la maladresse de flash-backs répétés s’estompe, seule flotte le fil narratif assez fascinant, la petite musique ambigüe de Greene, entre bourgeoisie hypocrite et étriquée, passions mal ajustées, foi étrange.


Les dernières scènes, démêlant peu à peu les couches vaguement mystérieuses, vaguement surnaturelles, glissent avec émotions. Les frappes haineuses de machine à écrire ne s’éloignent pas totalement du cliché cinématographique, mais elles frappent juste dans l’esprit du spectateur.

LeWilliamNorth
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le 12 sept. 2015

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