Encore un exemple typique du film que j’aurais adoré adorer ; sauf que ce n’est toujours pas avec ce film que je vais trouver LA grande oeuvre made in del Toro.
Comme d’habitude avec le cinéaste mexicain, j’ai le sentiment d’aimer davantage l’idée que je me fais de ses films plutôt que les films en eux-mêmes. C’est con parce que j’apprécie vraiment son cinéma, ses références, son sens de la mise en scène, son soin quasi fétichiste apporté à l’esthétique de ses films, son adoration des monstres...
En l’occurrence, la volonté de del Toro de « corriger » la fin de Creature from the Black Lagoon en faisant en sorte que la Bête se tape la Belle, sur le papier j’adore l’idée. Vraiment. Mais ici et une nouvelle fois, il me manque quelque chose pour adhérer pleinement au projet. Il y manque de la chair, de l’incarnation, bref quelque chose qui irait au-delà de la jolie boîte à musique qui délivre sans aucun accroc une histoire finalement assez attendue.
On a donc affaire ici à un conte dans ce que cela implique de plus naïf, appuyé par la ritournelle toute mignonne de Desplat, avec sa gentille très gentille et son méchant très (voire UBER !) méchant. Mais à force de rester dans cet univers ultra codifié et comme alourdi par une production design extrêmement chiadée, on ne croit pas en grand-chose, et malheureusement et en premier lieu, en cette histoire d’amour hors norme.
Pourtant, il faut saluer le magnifique boulot effectué sur la créature, qui parvient à dégager ce qu'il faut d'étrange sensualité, avec cette posture impressionnante et ce corps parfaitement sculpté. On aimerait croire en la fascination qu’elle exerce sur le personnage d’Eliza, mais ça ne prend jamais vraiment.
Et même si del Toro aborde le sexe pour la première de manière aussi explicite, je n’arrive jamais à y croire, tout ça me semble comme plaqué artificiellement.
Alors j’apprécie le charmant livre d’images que The Shape of Water est indéniablement (enfin, vaut quand même mieux aimer le bleu), avec ses envolées chelous pour un blockbuster même d'auteur (la séquence de comédie musicale), mais je me prends surtout à rêver au film que ça aurait pu être si del Toro avait réussi à apporter autant de soin à ses personnages qu’à son production design.