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Dans un complexe gouvernemental, une créature inconnue est retenue captive. La vie d’Eliza, femme de ménage, bascule quand elle s’aperçoit que le monstre exprime des sentiments forts envers elle.



Nature humaine ou poissonnière



The Shape of Water, ce n’est ni plus ni moins qu’un nouvel instant de bravoure pour Del Toro. Après Hellboy et sa notion particulière du super-héros, après Pacific Rim et son vent de fraicheur sur le domaine des kaijus, et surtout après sa réflexion intime avec le Labyrinthe de pan, le réalisateur repêche une créature bien connue pour donner à l’eau une forme poétique.


En admirant cette somptueuse et intrigante affiche on se souvient évidemment de ce monstre amazonien dans le film « l’étrange créature du lac noir », soit le monstre culte de Jack Arnold qui bénéficiera d’une seconde vie dans les deux Hellboy avec le personnage d’Abraham Sapien. Mais pour ce troisième retour dans le paysage cinématographique, Del Toro s’attèle à terminer cette ébauche d’un thème pourtant central chez les deux versions précédentes : l’amour.


Car c’est bien là le projet commun des trois films : nous amener à une réflexion sur l’amour et nous demander si cet accès à la dimension du désir peut faire de l’animal un être humain. Dans l’œuvre de Jack Arnold, une telle relation inter-espèce existait déjà sans être consentie avec une autre divine créature en la personne de Julie Adams. Mais à cause de cette absence de relation désirée, la créature nous renvoyait son image de monstre des profondeurs répugnant souhaitant certes un contact intime, mais toujours par instinct primitif.



Face à l’intolérance



Avec The Shape of Water, les yeux d’Eliza (la protagoniste) constituent un passage parmi d’autres pour déceler l’humanité chez l’animalité, mais aussi pour dénicher l’animal qui sommeille en l’Homme. Démonstration rythmée par ses parcours dans le complexe top secret où le monstre est retenu captif, mais aussi au contact des mœurs des années 60. Car l’intention de Del Toro est bel et bien celle de capter le potentiel émotif de la créature face à l’incapacité émotionnelle de certains humains.


Le film nous dépeint un monde où l’intolérance règne en maître avec son lot d’homophobes, de racistes, de sexistes. En tête de liste le personnage de Michael Shannon « Strickland » qui prend plaisir à tourmenter le petit personnel, à malmener sa femme, et à torturer la créature. Seules quelques belles âmes directement concernées par ses préjugés (une célibataire handicapée, une femme noire, un homosexuel) le confrontent pour sauver une créature douée de sensibilité. Le tableau peut paraître grotesque présenté de cette manière, mais il est la meilleure matière possible pour aborder les caractéristiques véritables de la nature humaine. Des critères « humains » et « monstres » incorporés depuis toujours avec passion dans la filmographie de Del Toro.


L’union réprouvée des deux amants est même lourde de sens tant elle se développe dans une société malveillante qui peine déjà à accepter les plus simples différences. On pourrait presque y voir un défi provocateur lancé à la face de l’intolérance.



Un ballet subaquatique



La réflexion s’établit grâce à une forme de poésie : photographie verdâtre, chorégraphie gracieuse, musique berçante, la créature elle-même par son allure est construite pour la poésie. C’est d’ailleurs significativement étrange de jongler entre la froideur de la réalité et le doux plongeon dans un monde onirique. Car quand la protagoniste et la créature se regardent, se testent, et se jaugent intimement, l’impact visuel des scènes nous amène indéniablement dans un conte de fées.


Un motif romantique qui permet au réalisateur de retoucher à la quintessence de son cinéma, en termes d’esthétisme et de technique, comme ce fut le cas avec le Labyrinthe de Pan. On lui reconnaît en effet bien là son goût pour les défis en développant de fortes thématiques à travers des images évocatrices plutôt que de longs discours. A l’instar de la jeune Ofelia qui s’émancipait au contact de la faune et de la flore dans le Labyrinthe de Pan, les deux amoureux pourtant muets expriment sans mot dire un amour puissant. Dans un ballet subaquatique, l’intimité fait bouillonner l’eau d’un érotisme brûlant, et on y décèle alors la lumière qui pourfendra cette société gangrenée par la haine.



Conclusion



Le film prend le parti du rêve alors que les fondements de son histoire reposent sur un cauchemar. En pleine guerre froide, la découverte d’une créature homme-poisson engendre des intérêts contradictoires : atout militaire pour les uns, être humain doué de sensibilité pour d’autres. Une intrigue de conte de fées assimilée dans le monde réel où l’enchantement amoureux de deux amants défiera les préjugés sociaux de cette triste époque.



Incapable de percevoir ta forme, je te trouve tout autour de moi.
Ta présence emplit mes yeux de ton Amour,
elle rend humble mon cœur, car tu es partout.


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le 12 juin 2021

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Death Watch

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