Un film français de plus de deux heures sur l'une des plus fameuses affaires mafieuses de l'histoire, ça peut faire saliver, ou totalement rebuter. Encore plus quand les potos Dujardin et Lellouche sont réunis à l'écran pour incarner deux personnages à l'opposition fracassante.
La French traite bien évidemment de la célèbre French Connection, la filière française d'exportation massive d’héroïne vers les États-Unis, qui a œuvré pendant des dizaines d'années jusqu'à sa chute dans les années 70. C'est naturellement la période choisie pour le film même si ce dernier se permet quelques libertés temporelles, et pas seulement.
Pour illustrer le jeu dont justice et gangsters ont pris part, Jimenez a choisi de mettre face à face le juge Pierre Michel et un des grands parrains du milieu marseillais, Tany Zampa. Là ou dans la réalité les deux hommes n'ont fait que se livrer un combat à distance, le métrage livre de nombreuses scènes de rencontres afin d'expliciter le jeu du chat et de la souris auquel se livrent les deux hommes. Il en ressort notamment la désormais fameuse scène au sommet d'une colline du far west azuréen, le vent dans les cheveux et le soleil à l'arrière-plan.
La French est un véritable melting-pot de tout ce que le genre a pu apporter. Des scènes de boites de nuit dans un rouge saturé à la Mean Street, les célèbres séquences où Scorsese se plait à résumer toute une chaine de production en musique via un montage rapide et une voix off, une musique d'ailleurs parfaitement choisie mais qui sonne malheureusement faux aujourd'hui tant on l'a utilisé. Formellement ce 2ème film de Jimenez est, je trouve, plutôt réussi. Absolument pas original certes, mais réussi. La photographie désaturée et usée de Laurent Tangy y participe grandement, tout comme la reconstitution du Marseille des années 70. Vraiment appréciable, contrairement aux scènes aux USA...
Au niveau casting, j'ai beau être fanna de mister Dujardin, je dois l'avouer j'avais peur. Surtout pour son association avec Lellouche, son pote de toujours censé incarner un parrain marseillais d'origine napolitaine (ce qu'il prend bien la peine de préciser au détour d'un dialogue tellement on ne s'en était pas rendu compte...). Au final Dujardin est bon malgré ses petites mimiques récurrentes plutôt destinées à l’univers de la comédie. Lellouche est un poil plus caricatural, et je ne suis pas un grand fan de l'acteur, ça n'aide pas. Les seconds rôles sont pour la majorité franchement corrects, sauf peut-être les "américains" et leur accent tout droit sorti d'OSS 117 "Ah ah ah, sacwé Oubert !".
Quand à l'adaptation en elle-même, elle est très très libre. Il ne faut pas y chercher un document historique. Il y a beaucoup de références à des personnages ou des événements importants de la French Connection mais tout est mélangé pour donner lieu à un film avec un début, une fin, une longue poursuite au milieu et un héros intrépide. Le destin du juge Michel dictant la temporalité du métrage dans sa montée vers la gloire avant la descente aux enfers (Scorsese sors de là on t'as dit !). Cet enchainement rend un peu trop simple à mon gout des événements bien plus complexes, voir toujours inexpliqués, dans la réalité et induit en erreur le spectateur non averti sur la véracité des faits.
Mais alors pourquoi une si belle note me direz-vous ? Et bien je dois dire que je suis heureux de voir un film français de ce calibre. Je dois être un peu facile, c'est dangereux pour l'avenir du cinéma français d'ailleurs. Mais après tout ce qu'on a pu subir ça fait du bien d'avoir un vrai film de mafieux, avec une vraie ambiance, des personnages, des belles séquences, du sang et des larmes. Certes il manque quelque chose, certes la plupart est déjà vu, mais certes quand même.