"Duel au soleil" sans la tyrannie de Selznick pour un résultat bien meilleur !!!
"Ruby Gentry" (j'ai pas envie d'utiliser le titre français que je trouve peu en rapport avec l'histoire !!!) est certainement le "Duel au soleil" qu'aurait réalisé King Vidor sans la tyrannique de David O. Selznick. En tous les cas, les deux films ont trop de points communs pour qu'on ne les compare pas. "Ruby Gentry" est beaucoup plus court, on est débarrassé des lourdeurs et autres scories qui polluaient le western de 1946, mais on reprend le baroque très caractéristique du réalisateur du "Rebelle" ainsi que la même Jennifer Jones dans le rôle principal.
Avec cela, il n'est pas difficile de préférer "Ruby Gentry" à "Duel au soleil" et on peut légitimement se demander pourquoi le premier est beaucoup plus méconnu que le second.
Certes le film est loin d'être sans défaut. La fin est un peu précipitée, Charlton Heston, dans un de ses premiers rôles, montrera qu'il sera bien meilleur dans les rôles monolithiques de personnages historiques ou bibliques que dans le registre de la sensualité (un Paul Newman ou un Marlon Brando auraient beaucoup mieux assuré !!!), le personnage du frère puritain donc frustré sexuellement est très caricatural, et la voix-off du personnage du médecin ne sert à rien.
Mais heureusement les qualités pèsent plus lourd dans la balance. Jennifer Jones, en sauvageonne qui devient une femme d'affaires sans scrupule, brillent par sa beauté, sa sensualité et son énergie. Karl Malden, dans le registre, où il a été souvent employé mais il faut bien dire qu'il y était excellent, en "nice guy" qui se laisse parfois emporter est émouvant. Le baroque du cinéaste lui fait souvent des merveilles ; la promenade en voiture au bord de la mer, la scène dans le voilier, la protagoniste, dans son auto cachée derrière ses lunettes de soleil, faisant exécuter implacablement le coup de grâce qui va ruiner définitivement son amant, ou encore la pénultième séquence dans un marais de studio en sont de très belles preuves.
De très belles preuves qui sont autant de très bonnes raisons de visionner ce film injustement méconnu de King Vidor.