La préhistoire est une époque qui m' a toujours fasciné car on n'y connait que ce qu'on peut déduire de l'observation et des recherches d'archéologie, de paléontologie, etc ... Ce qui laisse une place non négligeable à l'imagination.
D'un point de vue littérature, pour moi ça tourne essentiellement autour des romans de JH Rosny Ainé et de Jean Auel. Rosny c'est le début du XXème siècle et Auel plutôt la fin du XXème. Du premier à la seconde, il y a sûrement une amélioration des connaissances mais le point commun, en ce qui me concerne, c'est que les deux sont aussi fascinants et passionnants l'un que l'autre dans des registres un peu différents (cf critique Vamireh)
Le film "La guerre du feu" de Jean-Jacques Annaud est tiré du roman de même nom de JH Rosny et raconte l'histoire de la domestication du feu, essentielle à la survie et au développement de l'humanité.
Le film propose une date à 80000 ans avant notre ère, les scientifiques et préhistoriens dateraient cela plutôt vers 400000 voire 500000 ans avant notre ère. Et c'est là qu'on voit que finalement la précision n'a pas tant d'importance que ça.
Le problème posé par le roman puis par le film de Annaud, c'est que très probablement il y a eu un moment où le feu devait être un vrai souci car il n'était pas encore domestiqué.
Une fois ces principes posés, on peut imaginer qu'il puisse y avoir des luttes entre tribus pour posséder ou dominer l'autre en s'emparant du feu. On peut aussi imaginer, comme souvent chez Auel, que les hommes étant peu nombreux, l'esprit est plutôt à l'entraide qu'à la guerre.
Là où le film se distingue du livre, c'est par l'absence de langage entre les personnages du film. Cela rend un effet formidable et saisissant de vraisemblance que ne peut pas avoir le livre. Ce dernier ne peut pas faire autrement que de décrire avec des mots intelligibles et les situations et les relations entre personnes. Je ne serais pas loin de penser que d'avoir imaginé des relations sans langage constitué est un trait de génie de Annaud.
De ce fait, tout est visuel et sonore dans le film : les grognements sont accompagnés de gestes qui permettent de comprendre sans peine ce qui peut être dit. On peut observer que toutes les tribus ne sont pas au même point de développement, certaines ne sont pas loin du langage articulé, d'autres, "les dévoreurs d'hommes" pour reprendre l'expression du roman, en sont encore à un stade antérieur.
Il y a des scènes magnifiques comme l'alliance des hommes avec les mammouths bien dans le style de Rosny.
Annaud n'oublie pas non plus l'humour avec la scène où les trois héros du film (les Oulhamr) se réfugient dans le seul arbre pour échapper au couple de lions en chasse et où on voit peu à peu l'arbre se dépouiller de ses feuilles mangées par les trois hommes.
Et il y a des scènes émouvantes et belles où la femme qui les rejoint, leur apprend à rire et où l'acte sexuel passe d'un acte "bestial" à un acte plus "tendre".
Comme toujours dans ce genre, le voyage entrepris par les héros est, au départ, une mission qui se traduit vite par un voyage initiatique où les voyageurs découvrent un autre univers, d'autres coutumes ou d'autres techniques.
Il y a peu d'acteurs ou d'actrices connus, en ce qui me concerne, sauf l'extraordinaire Ron Perlman dont, semble-t-il, c'est le premier rôle mais qu'on reverra ultérieurement avec plaisir ne serait-ce que dans le rôle de Salvatore dans le "Nom de la Rose" du même Annaud.
Les paysages sont littéralement somptueux : le film a été tourné en Ecosse, au Canada (Alberta) et au Kenya.
La musique de Philippe Sarde est splendide et accompagne bien le film lorsque les héros, admiratifs, découvrent un nouveau paysage et où la caméra fait alors des plans larges. La musique contribue efficacement au suspense de la création du feu avec les bouts de bois, comme si elle retenait son souffle.
Ce que j'apprécie aussi beaucoup dans le film d'Annaud, c'est que j'y retrouve l'ambiance toujours positive du romancier JH Rosny.