La Horde a tué le western, ...pour mieux le faire revivre.
La "Horde Sauvage" commence par un opéra sanglant, et fini par un opéra sanglant... et au milieu c'est le désert, pendant 2 heures, histoire de faire une pause.
C'est l'histoire d'une bande de truands, de potes criminels à la fin du grand ouest - période crépusculaire du genre cinématographique. Une guerre civile au Mexique semble poursuivre et anéantir les derniers cow-boys survivants, comme s'ils étaient les uniques représentants d'un genre de film voué à disparaître, et c'est en cela que Peckinpah semble nous dire qu'il faut rendre la plus belle copie qui soit, pour faire renaître le western ...et mieux le faire mourir.
Au début, des gamins torturent un scorpion, s'amusent avec. En arrière plan, la "Horde", gracieuse, majestueuse. Peckinpah filme des plans très courts ; le montage est haché exprès et contribue à créer cette tension, insoutenable, qui gagne en force à chaque seconde, et est calculée comme la bombe parfaite qui va imploser en nous.
Corps qui basculent au ralenti, à cheval, dans la vitrine d'un commerçant, passant qui prend une balle perdue, beauté des scènes, esthétique de l'action et de la violence. Un opéra. Après ce "film dans le film", cette introduction, commémoration de ce qu'à été le western et de ce qu'il ne sera plus, le réalisateur nous fait savourer une histoire, celle d'un groupe d'hommes qui ne sait pas vivre autrement que comme des truands, des hors-la-loi, et qui même fortunés ne veulent pas se contenter d'une retraite paisible au soleil du Mexique.
Au milieu du film, il s'agit des vas-et-viens d'un groupe, de leurs frasques, leurs bêtises (l'attaque d'un train, l'explosion d'un pont...), et de leurs coups de gueules, leurs bouderies, leurs états d'âmes. La Horde, c'est un groupe de caractériels, de personnalités fortes (juste William Holden, Ernest Borgnine, Ben Johnson et Warren Oates... sacré groupe), qui ont même du mal à respecter leurs propres règles et lignes de conduite. Pas très civilisés, ...sauvages quoi. Et puis quelques boutades aussi : un membre de la horde a une envie pressante, celle de larguer sa merde. L'un de ses collègues lui envoie un bâton de dynamite sous le cul alors qu'il s'apprêtait à couler son bronze. Heureusement pour lui, sur le qui-vive, il réagit à temps. C'est ça la Horde. La Horde Sauvage, c'est comme Motorhead, s'ils passent trop de temps dans votre jardin, il n'y aura plus de gazon, plus de fleurs. La Horde (au moins pour deux d'entre eux) aime la boisson et les filles (les "salopes" comme a dit Peckinpah). La Horde est classe, même quand leurs chevaux dégringolent au ralenti le long d'une dune dans le désert, c'est gracieux.
Et puis, "La Horde" c'est aussi cette relation d'amitié forte entre Robert Ryan et William Holden. Comme deux aimants qui s'attirent, ils forment une "horde à part", une entité avec deux faces distinctes, tiraillée par deux cheminements différents : la poursuite dans la criminalité pour Holden, le pseudo-retour dans le droit chemin pour Ryan.
Les seconds rôles de qualité pleuvent... parmi les drôles à retenir, il y a ces mercenaires qui poursuivent la Horde depuis le début du film : L.Q Jones et Stroter Martin, inénarrables, qui n'arrêtent pas de se pouiller.
Et la fin du film ...épique, qui clôt le film comme il a commencé, comme un opéra sanglant. L'ouverture est finalement optimiste, alors que le soleil décline, préfigurant le genre "crépusculaire", qui, avec cette copie surpasse le genre western - "originel". Un grand moment, une perfection sous toutes les coutures. Avec des plans de paysages qui n'ont rien à envier à la "Prisonnière du désert". Merveilleux.