Vanté qu'il était par son visuel époustouflant, je sens que ce film fera date chez moi.
L'histoire je la survole : c'est une histoire d'amourette dans les champs, de dualité entre le jeune costaud plein de vitalité et le riche paysan qui est intéressé pour de mauvaises raisons. C'est moins haut qu'une histoire de Pagnol. Ceci dit le parallèle m'a fait sourire : les provinciaux de tous les pays ont décidément tous les mêmes problèmes. Mais bref, le coeur de l'oeuvre c'est sa forme la plus formelle.
On m'a vanté un film reposant sur un style visuel emprunté au réalisme pictural. De fait, difficile pour un français de ne pas sentir Millet dans les plans de glaneuses. Me renseignant peu sur la genèse du film, j'apprends brièvement que les réalisateurs filmeront en plans réels les séquences, que les principaux plans seront repeints à la main par des peintres spécialistes ès peinture à l'huile, puis animeront les plans de coupe selon les peintures ainsi produites.
On aurait tout aussi bien pu filmer à l'ancienne et passer le film entier sous la moulinette d'un effet pictural After Effects que j'aurais eu le même ressenti. Ce ressenti c'est celui d'un film tristement banal sur lequel on a mit un filtre "peinture à l'huile" comme on en trouve sur le net pour 5€.
Parce qu'en dehors de quelques plans qui passent pour des tableaux animés, j'ai senti juste ça : un film avec un filtre.
Posons-là l'essentiel : non, un film n'est pas une vingtaine de tableaux entrecoupés de plans chiants avec un filtre de peinture. Parce que sous quelques plans idéaux pour une bande-annonce ou pour des miniatures de vidéos, on essaye de cacher un film qui fait triste mine face à n'importe quel film naturaliste qu'aurait fourni Bresson ou que fournirait Dumont.
- Soit tu assumes ton parti-pris esthétique et tu ne proposes QUE des tableaux, sans transition. Donc abandonne les plans rapprochés où deux-trois femmes se font des potins, mets-moi un plan large avec la ferme, des poules, un banc, un panneau et deux personnages noyés dedans pour me présenter un TABLEAU. Chaque plan, chaque découpage devrait présenter un TABLEAU. Pas juste quelques moments
- Soit tu assumes ton filtre à la con comme un simple effet d’esbroufe et tu me refais une redite de Bernanos en Pologne dans toute la banalité naturaliste qui a si bien marché pour Pialat.
En bref : choisir le film ou choisir la peinture. Mais choisir un film repeint, c'est faible.