Jamais deux sans trois, et après les déjà pas fameux Pompéï et 300: La naissance d'un Empire, Hollywood enterre définitivement le péplum six pieds sous terre avec cette variation outre atlantique de l'étron ultime. Une expérience presque mystique, et qui repousse les limites de l'approximation historique, en nous envoyant par moins 1200 dans une sorte variation Romaine de la Grèce, arènes et gladiateurs compris. Sauf que l'Empire Romain, c'est au premier siècle qu'il connaît son âge d'or. Un millénaire de décalage, c'est énorme, c'est improbable, mais le plus fort dans cette Légende d'Hercule... C'est que ce n'est pas le pire.
Préparez-vous.
Prenez une forte inspiration.
Serrez les fesses.
C'est parti.
Dans cette étrange quatrième dimension de l'histoire antique, Héra, devenue une fort sympathique donzelle prête à tous les sacrifices pour le bien de la patrie, offre à la reine Alcmène la semence de son surpuissant mari, Zeus. Le produit de cette alchimie délicate, outre une improbable scène de sexe sans nudité et sans pénétration (rien de moins qu'une immaculée conception, dans les faits), étant supposé, en la personne d'Hercule, mettre fin au règne tyrannique du roi Amphitryon. Le tout avec pour toile de fond une vague amourette entre Hercule et Hébé, malheureusement aussi enflammée que la toundra côtière de l'Arctique. Ce serait amusant si seulement c'était drôle, mais cette Légende d'Hercule réussit également l'exploit de passer à côté du second degré pourtant latent de son entreprise, la faute à un sous-texte évangéliste digne d'un film de propagande de Saint-Nicolas du Chardonnet. Tous les méchants sont bien évidemment des impies, des hérétiques; et exit le polythéisme, place à un Zeus omniscient et à une Héra virginale, le tout avec pour pivot central la révolution spirituelle d'Hercule, petit Jésus au chemin de croix revisité, véritable "born-again christian" d'un temps où le christianisme n'existait même pas.
Outre le fait de s'être trompé d'époque au niveau diégétique, La Légende d'Hercule s'est donc également trompé d'époque tout court, sortant approximativement un demi-siècle trop tard. La violence et le sexe, affreusement édulcorés, culminent lors d'une des rares incartades d'Hercule et d'Hébé, lorsqu'une infime partie du conséquent budget, 70 millions tout de même, semble s'être envolée afin de... Supprimer numériquement les tétons de Gaia Weiss. Non non, vous ne rêvez pas. J'ai eu beau chercher, impossible de trouver ce sacrosaint morceau de chair fraîche. Aucune surprise néanmoins, le personnage d'Hébé, princesse de Crête manquant de se noyer à deux reprises dans vingt centimètres d'eau, étant, comme les autres, torché à la truelle. Alors bon, au point où on est, un téton de plus, un téton de moins...
En parlant de budget et de choix esthétiques malheureux, ce dernier film de Renny Harlin (bordel, ça aurait dû me mettre la puce à l'oreille) esquisse une direction artistique... Alternative. Faux-raccords, inserts immondes, effets spéciaux à la rue, ralentis intempestifs captant à la hâte les visages ébahis de figurants perdus: chaque plan du film est à dormir dehors, au point de donner l'impression que toute l'équipe technique s'est tirée la bourre pendant le tournage et la post-production afin de savoir qui du directeur de la photo, du superviseur des effets-spéciaux ou du monteur ferait le plus mal son boulot. Malheureusement pour eux, la palme de l'échec surréaliste revient au casting, qui s'acharne à faire concurrence au lyrisme des productions The Asylum. Et autant le dire tout de suite: non, ce n'est pas un compliment pour The Asylum, qui n'aurait de toute façon, même dans ses digressions les plus folles, jamais osé une scène comme celle du fouet de foudre. LE FOUET DE FOUDRE QUOI. LE. FOUET. DE. FOUDRE.
Je pourrais écrire des heures sur la Légende d'Hercule, tant elle se rapproche d'un précis des erreurs à éviter au cinéma, et ce à absolument tous les niveaux. Mais le film de Renny Harlin m'a déjà arraché plus de mots que prévu, plus de mots qu'il ne mérite de toute façon, et surtout, une heure trente minutes de ma vie, passée un instant dans l'enfer pieux du cinéma mercantile bête et méchant. J'ai honte, je me sens sale. Ça m'apprendra à aller voir de la merde au cinéma.