Quand j’étais petit, le mot « machine » avait encore cette senteur folle d’électricité liquide qui a porté La Mouche ou Retour vers le futur. Écrasés par l’hypermodernisme, le mot et le film sont devenus assez ridicules, mais cette impression m’a guidé sur le chemin du voyage dans le temps.
Quasiment la version française de L’Expérience interdite, La Machine utilise les codes de l’horreur ; une lumière hésitante jette sur les personnages des angles épatants qui aiguisent ces acteurs déjà projetés une première fois en-dehors de leurs habitudes : Depardieu en psychiatre dont la voix off nous tartine d’un vocabulaire qui essaye d’avoir la classe, Baye dans un rôle hélas mal écrit d’aimante compréhensive jusqu’à la sottise, Bourdon dramatique.
Ce style horrifique est comme un passage du film sous un filtre, tout comme Tarkovsky a traité la pellicule de Stalker à différentes températures. Ce chaud et froid américanisant de Dupeyron oscille un peu trop pour ne pas tomber dans un giallo raté où le macabre perd toute sa force, se reposant sur ses lauriers quand la vacuité qui Baye aux corneilles tente de se remplir elle-même. Les acteurs ont une bonne raison de jouer plusieurs rôles, et compensent – par leur expertise à cet exercice – les passages immémorables, pas vraiment mauvais mais juste insipides.
Le socle de science-fiction est le prétexte à qualifier le film de démodé, mais sa prise de position plus draculesque que cronenbergienne suffit à faire des pupilles luisant dans le noir et du problème à trois corps les deux piliers de son intérêt.
Quantième Art