ATTENTION SPOILE INTÉGRAL PENDANT TOUTE LA CRITIQUE !!!!

Après avoir lu les différentes critiques du film publiées sur le site, je suis surpris à quel point les gens n'ont pas compris le but du réalisateur. Certes, La montagne sacrée est une œuvre mystique et des plus psychédélique. Juste parce que l'on voit des pentagrammes, de l'alchimie, des signes bizarres et qu'il est question d'immortalité, le film se limite à de la branlette intellectuelle. Il est temps de rentre hommage à ce film en le spoilant allègrement car il n'y a pas d'autres moyens de le défendre.

Le film raconte l'histoire d'un Alchimiste accompagné d'un homme ressemblant à Jésus et d'un groupe « d'hommes de pouvoir» qui décide de grimper en haut d'une montagne appelée « La montagne sacrée ». L'alchimiste leurs a promis qu'au sommet de cette montagne, des sages les attendent et leurs donneront le secret de l'Immortalité.

Le film se divise en 3 parties :

1- le film s'intéresse au sosie de Jésus jusqu'à sa rencontre avec l'alchimiste.
2- Présentation des « hommes de pouvoirs »
3- Voyage vers la montagne sacrée (quête initiatique)

La première partie nous présente Jésus se réveillant dans le désert et se faisant crucifié et lapidé par des enfants. Il réagit et riposte en relançant les cailloux sur les enfants. Il n'est pas Jésus mais juste un vagabond et un voleur ressemblant à Jésus. La visite de la ville nous fait découvrir une ville mexicaine où des soldats tuent des civils à tour de bras sous les yeux émerveillés de touristes qui filment. On est en présence d'une critique des dictatures. Jodorowsky étant d'origine Chilienne, il n'est pas difficile de penser au parallèle entre la dictature de Pinochet et les scènes de massacres et de viol.

En parallèle, on assiste à des scènes où l'on voit des statuettes du christ vendues en masse, plusieurs scènes de la bible rejouées par des hommes obèses, des Marie-Madeleine plus ou moins lesbiennes, la duplication de statue du Christ en plâtre par centaine, la bible dévorée par des vers. C'est une attaque directe envers la religion qui ne véhicule plus un message spirituel mais vend en masse sa spiritualité dans tous les sens. Ces images représentent tous les vices et les défauts de la religion de manière habile. La religion est décadente et la société aussi, ils sont tous acteurs de cette décadence.

La scène de la reconstitution de la découverte des Amériques et du massacre des aztèques par les Espagnols se passe de commentaire. L'avoir transposé avec des crapauds était vraiment une idée excellente.

La tentative de vol de l'alchimiste et l'initiation à l'alchimie et au tarot du Vagabond sont un bon délire mystique comme apprécie Jodorowsky. Mais comme dans « L'Incal » ou dans « La Caste des Méta-Barons », ce mysticisme est toujours assez trash, comme la scène où il change la merde en or (Pasolini et Salo ne sont pas loin).

La seconde partie présente les hommes qui vont accompagner le Vagabond et l'Alchimiste dans leur quête. Ils sont au nombre de sept, chacun est représenté par une planète du système solaire :

- Venus, un fabricant de cosmétique, critique de la société où tout se base sur l'apparence pour réussir, au point de créer des êtres qui ne sont plus naturels.
- Mars, une vendeuse d'arme, critique de la guerre, des marchands d'armes à une époque où la guerre froide faisait rage.
- Jupiter, un vendeur d'art, ce dernier n'a plus d'âme, il est fabriqué et vendu à la chaîne, il est impersonnel. Critique du milieu artistique qui s'appauvrit au profit de la production de masse.
- Saturne, la vendeuse d'arme en plastique pour enfant, critique du conditionnement des enfants via des jeux violents et de la banalisation de la violence.
- Neptune, le chef de la police, critique des manifestations réprimées dans le sang et de la police de plus en plus violente et ne protégeant plus la population.
- Il reste Pluton et Uranus dont je ne me souviens plus très bien les rôles.

Ils rencontrent tous l'Alchimiste et le Vagabond, malgré tout l'argent du monde et le pouvoir, ils leurs manquent l'immortalité, la forme ultime du pouvoir. Pour cela, ils doivent se débarrasser de leurs biens matériels comme l'argent en le brûlant. On passe dans la troisième partie qui s'avère être la plus intéressante.

Si l'on s'arrête à ce stade du film malgré un ton toujours assez humoristique, le film apparaît comme un film effectivement très mystique et glauque. La dernière partie se présente comme un voyage initiatique où les personnages vont devoir passer un certain nombre d'épreuves pour pouvoir accéder à l'immortalité. Entre les discours métaphysiques et d'apparence Hippie, on découvre la vraie motivation du film. Son but n'est pas de faire l'apologie du hippisme ou du mysticisme, il présente un mode de pensée qui à l'époque était extrêmement répandu. Dans les années 70, l'utilisation de LSD ou d'autres psychotropes étaient utilisées, pourtant, son film ne dit pas « faite l'amour et pas la guerre » ou « encore vive l'alchimie et la drogue ».
La scène dans le bar où le drogué fait son speech sur le LSD en disant que l'apocalypse, dans la bible, a du être écrite sous un trip à la mescaline est juste hilarante. Le propos est tellement à coté de la plaque qu'on ne peut que voir le ridicule du discours et du personnage. On sent toute l'ironie et le ridicule de la situation encore une fois, lorsque les héros escaladent la montagne et font « un » avec la nature, et que la femme se met à frotter son clitoris contre la montagne.

Je pense que l'équipe devait être bien shootée pour pondre ces scènes complètement barrées mais au final le propos est l'inverse de ce qu'on voit à l'écran, il ne cherche pas à y défendre une quelconque doctrine.

La preuve avec la fin du film, lorsque les héros arrivent à la table et découvrent que se sont juste des mannequins qui sont à la table et que les sages n'existent pas. L'alchimiste apparaît et en s'adressant à eux mais aussi au spectateur, il tire la langue et agite les mains comme un clown. L'idée est claire, il dit : « Je me suis bien foutu de vous depuis le début ! ». Son monologue finis de donner un sens à son film, l'alchimiste à conscience d'être dans un film. L'intérêt n'est pas ce qui se trouve dans le film mais ce qui est bel et bien réel dans le monde. Il dit d'élargir le plan et d'élargir aussi notre vision des choses, il fait un appel à la tolérance, à la curiosité et à l'émerveillement. Ce qui compte, c'est la vraie vie et ce que l'on ressent vraiment, que ce soit la nature comme le reste. L'immortalité, l'alchimie ou même les drogues sont juste des moyens de fantasmer et d'échapper à ce qui nous entoure et à la réalité. Il nous montre bien que l'on peut faire dire ce que l'on veut à un film, et qu'il nous a balader du début jusqu'à la fin en maîtrisant parfaitement l'espace et le temps.

Je ne crois pas que ce soit un film pour ou contre la drogue, à la manière d'Aldous Huxley, il parle surtout de la perception, il dit au spectateur de prendre plus le temps de s'arrêter sur les choses qui l'entoure.

Au delà du propos universel, je ne m'attarderais pas longtemps sur l'aspect esthétique du film qui est très soigné. Chaque scène ressemble à un tableau comme la scène d'intro ou la scène où La vierge obèse tient le Vagabond (Christ) dans ses bras. Le style est très 70's et pourtant il n'a pas mal vieillit.

Ce que j'ai écrit, je l'ai écrit à chaud après la séance, je ne sais pas si j'ai mal interprété ou que j'ai trop extrapolé. Mais en regardant le film on sent que chaque scène et chaque plan est bel et bien réfléchit et que chaque détail à un sens. Je ne prétends pas l'avoir analysé entièrement, j'ai juste donné les grandes lignes qui m'ont parut évidentes.
Alors quand je vois certaines critiques dire que c'est simplement mystique ou que c'est un film d'intello pour se rendre intéressant. J'ai juste envie de dire qu'ils sont passés à coté de tout l'intérêt du film et c'est bien dommage pour eux.
CREAM
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le 12 juil. 2011

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