"La nuit américaine" restera comme la grande lettre d'amour de Truffaut au Cinéma. Prêtant le flanc à la controverse dans cette période d'après 68, Truffaut a choisi pour sujet le cinéma classique de studio (et non celui de la Nouvelle Vague), et présente son métier comme un artisanat plutôt qu'un art. Pour lui, le résultat - le film terminé - compte moins que le processus collectif qui y mène, et il fait logiquement le portrait affectueux des relations de famille entre acteurs et techniciens, ignorant la description habituelle des luttes de pouvoir et des mesquineries du "milieu", faisant de son film le contraire absolu du "Mépris" de Godard. Mais au-delà de cette vision "gentille" d'un univers clos et protégé, c'est la quintessence absolue de la grâce truffaldienne qui envoûte ici le spectateur, ce mélange léger de détails quotidiens avec un lyrisme souvent inattendu, toujours retenu, qui est inoubliable. [Critique écrite en 1989]