Les zombies, de nos jours, c'est une infection cinématographique, un virus qui s'est répandu plus vite que la mode Twilight, et a rapidement pris le contrôle des films d'épouvante, mordant la chair d'un autre genre, celui des vampires, dont peu d'oeuvres ont le mordant des métrages du mythique Romero. Et toi qui aura vu l'affiche du film du jour, et le titre même de l'article, tu auras compris que je vais vous faire la critique de "La Nuit des morts-vivants", mythique long-métrage qui resta gravé dans les annales dès le jour de sa sortie.
Au tout début, alors que le film commence, on peut remarquer un élément important : ce mythe des morts-vivants devenu cinématographiques sonne étonnamment amateur, sans budget. Une absence de moyens décents présents jusque dans la qualité du noir et blanc, plutôt laid, horriblement saturé lors des explosions, et duquel Romero se sert comme d'un moyen de poser son ambiance glauque, sale, ultraviolente et forte de son propos social engagé.
Présentant pour la première fois au cinéma un afro-américain dans un rôle principal (détruisant, alors qu'il n'est pas encore inventé, le futur cliché des slashers voulant que ce soit toujours lui qui meure le premier), il en fait le meilleur acteur du film, les autres étant entre le mutisme insupportable et le surjeu forcé pour créer de la tension, chose qu'ils réussissent sans pour autant embrayer aux moments dramatiques pour jouer justement.
Pour le rôle de sa carrière, Duane Jones signe une performance charismatique, engagée, habitée; véritable moteur du film, il conduit le spectateur dans les pires retranchements de cette maison en bastion, prend son courage à demain jusqu'à tomber sur des drames impossibles à supporter, et des images d'horreur véhiculées de main de maître par un George A. Romero déjà révolutionnaire pour son tout premier film.
Morts qui bouffent les restes calcinés de deux personnages pourtant sympathiques, enfant qui s'attaque aux parents avec le regard du diable, conflits de tempérament qui virent aux trahisons infâmes, fin ironique et retourne coeur qui aura marqué, à n'en pas douter, des générations entières d'adolescents en quête de sensations fortes. C'est à ce moment qu'on comprend qu'il vaut mieux écouter parfois les couards, que suivant les situations, l'absence de réponse à une attaque constitue la meilleure parade à la mort.
Ces éléments du traumatisme final sont notamment amenés par le huis clos type western très réussi, où chaque personnalité, ou presque, sera abordée, déposée sur la table, étudiée, et servira dans le récit. On s'attache à presque tout le monde, même au père de famille trop lâche pour sauver des vies, qu'on croira à un moment donné sur le chemin de la rédemption pour se rendre compte, la scène suivante, qu'il était seulement en proie au doute, et que sa couardise est revenue avec force.
Eprouvant de bout en bout, La Nuit des morts-vivants aura eu la bonne idée de jouer astucieusement avec son manque de moyen : nous servir une histoire intimiste, en huis clos, où l'on développe autant les personnages que l'action sur une durée restreinte (moins d'une heure et demi) aura permis à Romero d'entrer dans la légende : premièrement en tant qu'initiateur de la vague monumentale de films de zombies qui s'ensuivit (relancée avec talent par l'excellent Dawn of the dead), finalement comme le maître d'une horreur nouvelle, celle des Midnight Movies, des horreurs crasses et du Nouvel Hollywood.
Un incontournable, qui n'a d'égal à sa conclusion que l'ultraviolence désarçonnante de ses mises à mal, voir à mort.