Dernière création de Dominik Moll (Seules les bêtes....) et de son comparse Gilles Marchand (Dans la forêt...) au scénario. Le polar avait réussi à faire du bruit au dernier Festival de Cannes et sa sortie était une des attentes de cette année. Le résultat est-il à la hauteur de l'attente ?
"La nuit du 12" est un des grands films de 2022, une nouvelle preuve que le cinéma français peut nous surprendre. Un dédale funeste qui broie ses personnages face à un mal trop grand, et un crime qui est plus que jamais d'actualité, le féminicide.
Dans ce polar froid, Dominik Moll pense sa réalisation avec intelligence et efficacité. Aux détours de quelques plans qui semblent banals, un crime est commis, une femme brûle, dans un plan au ralenti qui nous montre ce corps enflammé, et nous, aussi impuissants que les personnages, nous regardons la fatalité qui s'abbat sur cette jeune femme comme sur son spectateur. Avec un montage qui se veut faussement lent, le film monte en pression au fur et à mesure que ses personnages se perdent dans ce labyrinthe macabre.
Le film s'attarde aussi énormément à poser son décor, ici désespéré et vénéneux. Que ce soit en nous filmant la minéralité de cet environnement où règne aussi le désespoir de ces vies brisées au milieu de ces petits villages et de ces montagnes imposantes, écrasantes. C'est aussi grâce à cela que les personnages arrivent à s'épanouir et à prendre en force dramatiques, avec une réalisation maîtrisée qui arrive à dépeindre avec force la machine qui broie nos personnages, et nous plonge dans une labyrinthe macabre, oppressant.
Outre ce volet visuel réussi, on ne peut nier que ce polar bénéficie d'un scénario particulièrement bien ficelé ! Tout en reprenant les codes du film policier, le film s'attarde également à nous montrer le tourbillon infernal qui va emporter nos personnages, tant par cette enquête insoluble, que par ce système corrompu et vain, ou encore par ces portraits d'hommes, tous lambdas et pourtant tous coupables. Car la finalité nous montre bien que trouver le coupable de ce féminicide est impossible, car chaque homme est coupable, chacun d'entre eux est aussi horrible que l'autre, tout comme aussi absurde ! Ce que le film nous montre va au-delà de la cruauté d'un fémicide qui va hanter nos enquêteurs, comme le spectateur. Un grand point fort du film, c'est que le spectateur connaît le dénouement de l'enquête dès le début du film, et ce qui rend cette enquête encore plus touchante et déchirante. Un grand film d'enquête, mais surtout un grand film féministe !
À côté de ça, nous avons un duo d'acteurs Bouillon-Lanners qui transcende tout ! Entre un capitaine qui sera hanté par cette enquête et son collègue qui bouillonne face aux profils misogynes du film jusqu'à exploser. Un duo que l'on suit dans un cadre anti-spectaculaire, et pourtant qui nous bouleverse dans chaque scène.
En conclusion, "La nuit du 12" est certainement l'un des meilleurs films de l'année ! Un polar génial, haletant et éprouvant, mais aussi un grand film sur le féminicide qui va nous marquer, nous hanter comme ses enquêteurs. Visuellement maîtrisé de bout en bout, le film nous emporte dans un enchaînement de scènes frappantes, et magnifiquement interprété. Une grosse claque, et qui va vous questionner !