Le premier film d'un réalisateur, c'est la quasi-certitude de voir à l'écran un sens de la débrouillardise quasiment imposé par le budget moindre, et une volonté de faire ses preuves qui peut tout autant s'avérer un défaut qu'une qualité, parfois les deux en même temps. On ne sera donc pas surpris de retrouver ces deux éléments dans ce coup d'essai du belge Michiel Blanchard.


Partant d'un canevas on ne peut plus classique (le quidam sans histoire qui, parce qu'il était au mauvais endroit au mauvais moment, se retrouve pris dans un engrenage qui le dépasse), le jeune cinéaste délivre un thriller nocturne certes sous influence (essentiellement américaine) mais avec suffisamment de personnalité pour se détacher de la simple copie trop sage. On saluera l'efficacité scénaristique constante dont Blanchard fait preuve, renouvelant les enjeux de l'histoire et développant ses protagonistes à travers les différents lieux traversés ; tout comme sa volonté de resserrer l'intrigue sur une seule nuit, permettant ainsi au rythme de ne jamais faiblir. Le tout porté par une mise en scène solide et nerveuse se permettant même, à plusieurs reprises, quelques plans acrobatiques au drone parfois ostentatoires mais très pêchus et contribuant au dynamisme de l'ensemble.


Le casting, hétéroclite, s'avère plutôt convaincant, notamment le jeune Jonathan Feltre qui porte le film à bout de bras et réussit à nous impliquer émotionnellement dans le calvaire vécu par son protagoniste. A ce sujet, on remerciera le réalisateur de nous épargner la traditionnelle « johnwickisation » à mi-parcours qui voit la victime se transformer subitement en machine de guerre et rendre les coups. Et puis, voir un Romain Duris en salopard impitoyable fait toujours plaisir.


Dommage, cependant, que le film tombe dans le piège typique des premières œuvres, à savoir l'utilisation d'un événement socio-politique actuel (en l’occurrence, les manifestations consécutives au mouvement Black Lives Matter) comme simple décor et non comme apport au propos du long-métrage, si ce n'est au cours d'une séquence assez maladroite et inopportune.


De menus défauts certes, mais qui n'entachent clairement pas le plaisir du visionnage.

Little-John
7
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le 29 août 2024

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Little John

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