« La Passion Van Gogh » est un film que je voulais voir depuis longtemps et qui m’a laissé des sentiments mitigés, même si dans le fond j'ai apprécié. Je regrette quelques défauts, sans eux le film aurait été un chef d’œuvre à part entière. Certains aspects peuvent être qualifiés ainsi, par commencer par l’ambiance, mais l'oeuvre dans son entièreté assume quelques erreurs de choix, je crois.
Je ne suis pas très original sur ce point, car mon tableau préféré est « Nuit étoilée » de Van Gogh, et ce n’est pas parce que c’est l’un des plus connus, mais seulement parce que lorsque je le regarde je tombe en fascination, l’œuvre globale du peintre a aussi une cohérence et un sens pour moi. Lorsque j’ai appris la sortie d’un film d’animation, entièrement peint à la main, inspirée de l’œuvre du peintre, ma curiosité fut piquée. Je connaissais déjà dans les grandes lignes la vie du peintre, sa prétendue folie, et le fait qu’il soit un personnage hors normes. L’idée d’un film sur son histoire était de toute façon une excellente idée. Mais l’ambition de son esthétique est une audace encore plus folle, et franchement réussie, il faut le reconnaitre.
L’histoire, elle, s’intéresse à sa mort suspecte, avec une enquête posthume, sous des airs de film policier. Malheureusement, je trouve que c’est un point noir de l’œuvre. J’aurais préféré un biopic plus conventionnel, car cette enquête apporte son lot de langueurs et de répétitions, dont on se serait bien passé. Dans ce feu d’artifices visuels, le rythme et l’histoire dénotent, à cause de ce choix narratif. Ce pauvre Armand Roulin passe son temps à suivre les traces de feu Van Gogh et à interroger témoin sur témoin, sans jamais se confronter à quelque rebondissement que ce soit, sans rencontrer aucune surprise. Il ne s’agit que d’une longue enquête monotone, faite de rencontres et de dialogues, tant et si bien que l’on pourrait penser que le peintre n’aura réalisé dans sa vie que des portraits.
Les décors sont bien entendu un aspect que tous les passionnés du peintre apprécieront, car le film nous promène au cœur de ses chefs d’œuvres, avec une justesse et une immersion incroyable.
L’animation est exceptionnelle, chaque plan, peint à la main, était la promesse de l’introduction, et elle est tenue, mais le résultat, là encore, n’est pas exempt de défauts. On comprend rapidement, que les scènes ont été tournées au préalable avec de véritables acteurs, et trop souvent, l’illusion du pointillisme surexposé n’opère pas. En effet, il semble évident que la technique utilisée ici et celle de la rotoscopie, qui consiste à relever image par image les contours d’un élément filmé en prise de vue réelle. C’est un procédé que l’on pourrait qualifier de paresseux, lorsqu’il n’est pas utilisé à titre indicatif. Opéré sur chaque plan, le style Van Gogh n’est sans doute pas une mince affaire, voilà pourquoi dans le cas présent, on ne pourrait pas dénigrer un tel travail, mais cela n’enlève rien à la désagréable impression de voir des acteurs en chair et en os, plutôt que des peintures en mouvement (ce que je crois était l'idée de départ du projet) comme si finalement, la peinture était constamment décalquée sur des photographies. Ce qui me gêne, à vrais dire, c’est que l’usage de cette technique est en réel décalage avec les inspirations du peintre, qui optait pour l’impressionnisme et avait une vision d’expressionniste, en substance on retient de ses tableaux leurs dimensions conceptuelles, loin du réalisme. La rotoscopie tend à se rapprocher au maximum de la réalité, dans le cas présent, cela se ressent au travers des mouvements, et dénote avec l’aspect et le contexte de l’œuvre en pointillisme. Le constat est encore plus évident dans les scènes de flash-back, dans ce cas précis c'est à se demander si les animateurs n’ont pas seulement usé d’un filtre d’image à rendu « coup de crayon » (je sais que ce n'est pas le cas, mais c'est l'impression que ça donne). La recherche de la perfection et du réalisme n'était pas un bon angle d'attaque pour aborder les mouvements au sein de l'oeuvre du peintre, quelque chose de plus burlesque et fantasmagorique aurait été plus judicieux. C'est mon avis.
Du fait de la technique, les acteurs sont très (trop) reconnaissables. C’est le cas de Jerome Flynn et Helen McCrory, que l’on reconnaitra pour peu qu’on les ait déjà vus dans d’autres films.
Au-delà de l’aspect visuel, ce qui m’a le plus frappé dans le film c’est sa musique. Un secteur amplement satisfaisant, avec des mélodies remarquables, envoutantes, inspirantes. Le film est aussi beau qu’il est agréable à entendre. Une magie musicale qui colle parfaitement à l’image. Bravo.
C’est un film que j’ai beaucoup apprécié, mais qui aurait pu être encore mieux, si l’histoire avait été tournée différemment. Ceux qui ne sont pas connaisseurs de l’œuvre du peintre et de sa vie devraient s’ennuyer. C’est plutôt un film pour les passionnés, et je le regrette. Il aurait mieux valu qu'il raconte sobrement l’histoire du peintre, en usant des mêmes techniques, et de la même immersion, cela aurait été une invitation au voyage destiné à tous les publics. On retiendra de ce film son ambiance particulière et unique, ainsi que le travail colossal qu’il représente pour les artistes. Un film d'animation qui tente des choses nouvelles, plein de sens, et d'audace.
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